Légende et Histoire de Guebwiller…
La géographie
La localisation du mont Unterlinger, à la sortie de la vallée de la Lauch, est assez comparable à celle du Vorbourg (Clos Saint-Landelin) au débouché de la "Vallée Noble", quelques kilomètres plus au nord. Situés dans le champ de fractures de Guebwiller, dont les deux axes principaux de failles ont donné naissance aux vallons d'Orschwihr et de Westhalten au nord-est, les grands crus Kessler, Kitterlé, Saering et Spiegel présentent une palette d'orientations allant du sud-ouest à l'est. La vigne grimpe ici jusqu'à 360-
Le climat
Les ingrédients climatiques du secteur de la Lauch sont communs au vignoble alsacien des collines: des influences océaniques nuancées par un effet de foehn et par le caractère semi-continental de la plaine d'Alsace. Les précipitations atteignent
Une dizaine de fontaines réparties à travers le vignoble canalisent d'ailleurs les écoulements sou terrains, permettant d'abreuver les chevaux.
En 2003, millésime caniculaire par excellence, les vignes n'ont pas souffert du manque d'eau. Sur le Kitterlé, à
Les terroirs et l'encépagement
Plutôt faible par nature, l'aptitude à l'échauffement des sols gréseux est, sur le grand cru Kitterlé, compensée par l'exposition sud combinée à la forte pente. Sur ces sols très filtrants (sableux), le drainage est excellent. Planté sud- est/est, le gewurztraminer bénéficie du réchauffement matinal, ainsi que d'une restitution non négligeable de chaleur des très nombreux murets de grès. Le riesling doit, pour sa part, bénéficier d'une implantation lui permettant de conserver une acidité suffisante.
Au contraire de l'éperon du Kitterlé (tendance au passerillage) ou de la parcelle Saering du domaine Dirler-Cadé - rarement atteints de pourriture noble en riesling et gewurztraminer, compte tenu de la ventilation -, les flancs du Kessler, à mi-pente, sont régulièrement sujets au botrytis.
Les vins
Le Kitterlé donne des vins peu exubérants, ayant besoin de temps. Subtils, ils présentent parfois une note de fumé. Le gewurztraminer est plus vertical et minéral que le Saering et, surtout, que le Kessler nettement plus massif.
Le travail des hommes
« Conserver ou reconstruire les murets en pierres sèches structurant le coteau est nécessaire, pour limiter le lessivage des e1éments minéraux vers le bas du coteau, la fuite des argiles et de la matière organique, liés à l'érosion des sols»,
Le domaine Schlumberger emploie trois maçons à l'année. Les deux hectares du domaine Dirler-Cadé, sur le Kessler, sont plantés en partie dans le sens de la pente, à contre-courant de la tendance générale qui suit les courbes de niveau. En termes d'érosion, phénomène auquel les sols sableux sont sensibles, cette seconde option semble préférable. Mais si le coteau est en terrasses et si la pente des terrasses le permet, planter dans le sens de la pente est possible. La plantation parallèle aux courbes de niveau diminue la densité de plantation. En orientation sud, l'exposition des raisins n'est pas aussi homogène. Sur le Kitterlé, avec
Kitterlé, la Légende
La légende rapporte que le nom de « Kitterlé », autrefois « Kütterlé », vient de Kuter (dialecte souabe) et signifie gros matou sauvage. Celui-ci habitait jadis le « Haut Saering » et son esprit malicieux se manifestait dans les tonneaux des châteaux environnants
Mais selon une autre version, « Kütterlé » serait le nom d’un pauvre vigneron de Guebwiller qui, le premier, eut l’audace de partir à l’assaut de la colline pour y planter des vignes.
Historique :
La mythologie germanique raconte que Odin, dieu magicien et rusé, fertilisa la vallée de Guebwiller. Blessé au pied par un sanglier, il fit naître une fleur de chaque goutte de son sang répandu. Les fleurs envahirent les coteaux, pour s’épanouir avec éclat dans les raisins chargés de sang divin.
Le Kitterlé fût travaillé sans interruption depuis plus de 10 siècles.
Ils deviennent ainsi les précurseurs des « Appellations d’Origine Contrôlée ».
Description de Terroir
Un terroir travaillé sans interruption depuis plus de 10 siècles, affirme Georges Bischoff, professeur d'histoire médiévale à l'université de Strasbourg : "Le Kitterlé est un véritable monument historique. La montagne a été modelée par les hommes à la force de leurs bras. A plusieurs reprises elle s'est à moitié effondrée. Et l'on a dû construire plus de
Pourquoi cette obstination à travailler un endroit aussi ingrat, alors que la vigne aurait pu s'étendre en plaine ?
Tout simplement parce que le Kitterlé est un terroir magique, "pauvre et sablonneux, qui ne peut jamais donner de grandes quantités de vin. Mais cette pauvreté du sol, avec son exposition au soleil du levant au couchant, favorise la concentration des arômes dans le raisin et donne des vins d'une exceptionnelle longévité", (Beydon-Schlumberger) descendante d'une famille de sept générations d'industriels-vignerons. Son ancêtre Nicolas Schlumberger ne pouvait ignorer les venus de ce terroir lorsque, en 1810. Il se mit à acquérir les plus belles parcelles des environs : "Pour la force capiteuse, la finesse du bouquet, aucun autre cru d'Alsace ne surpasse le Kitterlé", dit un chroniqueur du XIXe siècle.
Les parcelles sont regroupées pour former des ensembles homogènes, ne comportant que le cépage le mieux adapté au sol et au climat. Cinquante kilomètres de murs de soutien sont reconstruits ou restaurés. Cinq terrasses accueillent
Kessler
Description du Terroir.
Gentlemen affables
"Le Kessler partage la même veine géologique que le Kitterlé, mais ses sols sont différents dans leur constitution et leur texture. Ils sont plus lourds et plus riches que ceux de son voisin. Peut-être parce que l'argile est plus présente par endroits et que, à la place des conglomérats de quartzite et des dépôts gréso-volcaniques que nous trouvons dans le Kitterlé, ici nous sommes en présence, surtout à la base du grand cru, d'affleurements de Muschelkalk recouverts de sédiments gréseux", explique Laurent Rohrbach, responsable des cultures du domaine Schlumberger. Ces éléments ont une influence considérable sur le caractère des vins, ajoute son collègue Alain Freyburger, responsable de la cave : "Les vins du Kitterlé sont des montagnards, ils sont généreux certes, mais aussi rudes et parfois caractériels, d'une approche difficile, alors que ceux du Kessler sont des gentlemen affables."
Les vins du Kessler possèdent à la fois la puissance et la finesse, affirme Jean Dirler de Bergholtz. "La nature du terroir et son exposition sud-est, engendrent un équilibre entre le sucre et l'acidité qui les rend incomparables. Ce sont des vins ronds, puissants, élégants et flatteurs qui développent des arômes persistants dans la souplesse et l'harmonie." Les gewurztraminers couvrent la plus grande partie des
Sous la main de l'homme
A cet ensemble de facultés, il faut ajouter la régularité dans les rendements et la persistance de la qualité d'une année sur l'autre, signalent les vignerons du Kessler. "Les récoltes se situent entre 30 et 40 hl/ha, sans que l'on ait besoin d'intervenir pour réduire la production de raisins, et la qualité ne fait jamais défaut, quel que soit le millésime. Le terroir s'équilibre de lui-même", affirment-ils. Sans doute ont-ils raison. Mais cette vision idyllique du terroir passe sous silence le labeur qu'ils accomplissent pour que l'œuvre de la nature donne toute sa signification à l'appellation grand cru. Les soins apportés à la vigne, aux parcelles et aux fruits de la vendange démontrent que, si terroir produit le vin, le grand cru, lui, se fait sous la main de l'homme. L'harmonie dans la bouteille traduit, en somme, la complicité de la vigne avec le terroir, l'adéquation du cépage et du porte-greffe aux énergies souterraines et aériennes de la nature sous l'impulsion raisonnée et volontariste du vigneron. Cette impulsion se manifeste différemment selon la personnalité de chacun, mais elle se cristallise dans la reconnaissance d'une nécessité impérieuse : le respect du sol que l'on cultive.
"Notre ligne de conduite obéit au souci d'assurer la pérennité du vignoble", déclare Alain Freyburger. Cela exige que l'on écoute les vibrations que les racines transmettent à la plante afin de comprendre l'état du sol et de répondre à ses besoins de façon douce et naturelle. "Un sol malmené par une culture intempestive ou agressé par des produits nocifs se détériore et empêche la plante de développer le système nerveux qui la relie en profondeur aux substances minérales. Dans ces conditions la vigne finit par ne donner que de piètres raisins qui peuvent, tout au plus, servir à l'élaboration des pauvres vins", conclut-il.
Influence cosmique
On dit souvent que la vigne doit souffrir pour donner le meilleur d'elle-même. Peut-être faut-il voir dans cette croyance une réminiscence du précepte biblique qui veut que l'accouchement se fasse dans la douleur ou un vestige de l'idée romanesque selon laquelle le véritable artiste ne s'exprime bien que dans la misère. C'est vrai que des nombreux créateurs sont morts dans la pauvreté, mais rien ne dit que s'ils avaient connu la gloire de leur vivant leurs œuvres auraient été moins parfaites. Le talent n'est pas inversement proportionnel à l'absence de moyens pour subsister, loin s'en faut. De même, déclare Jean Dirler, "ce dont la vigne a besoin, ce n'est pas de souffrir mais d'être en harmonie avec le terroir. " Adepte de la culture biodynamique, il préconise la valorisation du sol et de la plante dans son environnement naturel par l'apport des matières minérales, végétales et animales qui respectent le cycle biologique de la vie. "C'est un travail minutieux qui suit le rythme des saisons et prend en compte l'influence cosmique sur le métabolisme de la plante. " Le résultat est une amélioration de la photosynthèse et un meilleur enracinement de la vigne, qui se traduit par des raisins plus riches et des vins de haute qualité, véritable expression du terroir qui les fait naître.
Source d'inspiration
Avec le Kessler, nous retrouvons un itinéraire dessiné, dès le VIIIe siècle, par les moines de l'abbaye de Murbach et que, plus tard, dans leur magnificence de princes-abbés, portèrent, de gré ou de force, au sommet de la viticulture alsacienne. La sauvegarde de ce patrimoine a toujours été le principal souci des vignerons que nous avons rencontré au cours de la décennie écoulée. Ils nous ont exprimé leurs inquiétudes et leurs espoirs suivant la conjoncture. Mais jamais ils n'ont doute des capacités de leurs terroirs. Avec le temps, nous les avons vus se rapprocher chaque fois davantage de leur terre, affiner leur travail et leurs méthodes pour que leurs vignes continuent à distiller une part de bonheur. Aujourd'hui, alors que la demande de grands crus confirme leur reconnaissance par un public de plus en plus large, les vignerons des versants ensoleillées du Florival poursuivent leur labeur pour que la qualité du vin soit la source d'inspiration de tout le vignoble alsacien. Dans cette démarche, le grand cru Kessler leur facilite la tâche.
Saering
Description du Terroir.
Le vignoble de Guebwiller embrasse les flancs abrupts du massif de l'Oberlinger. La vigne suit la marche du soleil délimitant une trilogie de terroirs modèles, dont les vins évoquent la poésie des fleurs et le parfum des légendes. Entre le Kitterlé et Kessler, le Saering cultive son originalité. Le Saering se détache de l'assise rocheuse de l'Oberlinger descendant vers la plaine, où il forme une sorte de mamelon calcaire sur lequel sont venus se déposer des conglomérats à galets gréseux et des débris de roche granitiques. Le mamelon se dresse telle une sentinelle aux avant-postes de l'entrée du Florival. La nature particulière de ce terroir a longtemps intrigué l'imagination populaire qui voyait dans ce bloc calcaire, isolé dans un univers de grès et de granit, un vestige de la mer recouvrant jadis la vallée du Rhin.
L'Abbé Braun, chroniqueur des "Légendes du Florival", voyait, pour sa part, dans l'étymologie du mot Saering l'origine d'un camp romain : "Un camp de cette espèce, dont on voit encore les retranchements, écrit-il en 1866, se trouvait sur le plateau du Sehring (ancienne orthographe), à l'entrée de la vallée de Guebwiller. On sait que les Germains désignaient leurs camps par le mot ring et ce nom-même de Seh-ring pourrait très bien, dès lors, avoir servi à désigner un camp d'observation." C'est précisément à cet endroit magique, "d'où l'on peut tout voir, même les esprits, sans être vu de personne", que l'Abbé Braun situe la demeure du dieu Odin, gardien des trésors de la nature dans la mythologie germanique.
Essence du vin
Nature, histoire et mythes se confondent dans le temps pour créer un monde symbolique dans lequel la réalité d'aujourd'hui semble se concrétiser. Au travers des traditions, le Saering, tout comme le Kitterlé ou le Kessler (l'ancienne Wanne), s'est perpétué comme une œuvre d'art sans cesse restaurée par le travail des vignerons. Occupé et certainement cultivé depuis Jules César, le Saering est cité pour la première fois en 1250, à une époque où la turbulente noblesse de Guebwiller dispute à l'abbaye de Murbach l'accomplissement de sa souveraineté féodale sur la contrée. Les vins du Saering, comme les autres crus voisins connaîtront leur apogée au cours du XIVe siècle en transitant par les routes de Bâle et de Lucerne en direction de L'Autriche. Dès 1830, les vignerons de Guebwiller et Bergholtz les commercialisent sous le nom du lieu-dit.
Tendresse du calcaire
Moins abrupt que le Kitterlé et de constitution géologique fort distincte, le Saering se montre plus docile dans sa morphologie et dans la typicité de ses vins. Protégé des vents froids par le massif vosgien, orienté vers le sud-est, bénéficiant d'une bonne hygrométrie, la vigne peut s'y épanouir précocement pour donner le meilleur d'elle-même. Riesling et gewurztraminer dominent le terroir, avec une prédominance du premier cépage sur le second.
"La nature sablonneuse du sol, reposant sur du calcaire jurassique, est particulièrement favorable au riesling", explique Jean Pierre Dirler de Bergholtz. "A la robustesse léguée par le granit, Saering oppose la tendresse du calcaire ", déclare Eric Beydon-Schlumberger. "Ses rieslings se démarquent par leur caractère floral, et un agréable fruité dès la prime jeunesse, moins vifs que ceux du Kitterlé ou du Spiegel, ils ont une acidité plus fondue, plus ronde et un aspect minéral plus discret", ajoute son collègue de Bergholtz, Eric Rominger.
A l'inverse, les gewurztraminers du Saering ont tendance à se relever d'une telle vivacité qu'il faut attendre trois ou quatre années pour pouvoir bien les apprécier : "ils expriment plus fortement les nuances du terroir", affirme Joseph Loberger, artisan vigneron à Bergholtz. Ce contraste souligne la particularité de chaque cépage, remarque Jean-Paul Sorg, chef de cave du Domaine Schlumberger : " Le riesling, comme le chardonnay, s'adapte à une multitude de sols, même si dans chaque endroit il acquiert un caractère différent ; alors que le gewurztraminer, plus sensible au micro-terroir, n'atteint sa typicité que dans son berceau alsacien."
Au-delà du cépage, les vins du Saering suivent un fil conducteur, celui de la qualité : "l'harmonie et l'excellente vinification qu'ils dénotent soulignent la sagesse des vignerons" observe Gilbert Mestrallet. "Notre souci, déclare Eric Rominger, est d'établir un équilibre entre les potentialités du terroir et les exigences du marché qui permette de récompenser nos efforts. "
Maîtrise de la qualité
Elargissant la réflexion à l'ensemble du vignoble, E. Beydon-Schlumberger estime pour sa part que l'essentiel est d'affirmer l'identité des vins d'Alsace : "Il serait inadmissible que l'on utilise les difficultés conjoncturelles comme prétexte à un certain laxisme, affirme-t-il. Dans notre région, poursuit-il, il y a 50 % de vignerons qui affrontent les vents et les marées et 50 % qui se tiennent à l'abri des tempêtes. Or un vignoble qui ne marche qu'à moitié dans la mise en avant de son image et de sa créativité est un vignoble difficile à gérer".
Ce bâtisseur infatigable de remparts sur les pentes hostiles de l'Oberlinger, se défend de prôner l'élitisme : "il s'agit de responsabiliser l'ensemble de la profession, parce que les anonymes font aussi partie de l'entreprise Vins d'Alsace". Citant en exemple les réalisations accomplies dans les Côtes du Rhône, il préconise la défense d'une région cohérente et dynamique capable d'avancer sans tergiversation : "Dans les Côtes du Rhône, ils ont bien maîtrisé la qualité dans son ensemble. Il y a quelques élites mondialement connues, mais tout le monde est englobé dans une même perspective : Côtes du Rhône d'abord, l'élite... peut-être !"
L'amour ce n'est pas se regarder l'un l'autre, disait Chateaubriand, mais regarder ensemble dans une même direction. Une maxime que les vignerons du Saering, amoureux de leur terroir, s'efforcent d'appliquer au pied de la lettre.
Spiegel
Description du Terroir.
A cheval sur les terres des communes de Guebwiller et Bergholtz, le grand cru Spiegel expose ses vignes en direction de l'est, le long d'une large bande de
Fidélité aux usages
Le souci d'être en harmonie avec les propriétés naturelles du sol et du microclimat, explique, sans doute, la présence rapprochée de plusieurs grands crus de petite taille entre Guebwiller et Bergholtz. Ces terroirs constituent autant de diversités complémentaires qui, ailleurs, auraient été englobées dans un seul ensemble. Mais cela reflète aussi une certaine fidélité à des usages qui remontent aux moines du haut Moyen Age. Selon la tradition, en effet, des prélats originaires d'Écosse auraient élu domicile au VIIIe siècle près du village de Bergholtz, nom qui signifie "bois sur la montagne ", une zone défrichée dès l'époque romaine. C'est là que prendra naissance le mouvement spirituel qui plus tard deviendra une puissance seigneuriale représentée par l'abbaye de Murbach, située au creux du Florival. " On peut penser, dit la chronique, que ces moines prodiguaient leurs conseils aux paysans dans l'établissement de vignobles sur le coteau pour la plus grande prospérité du monastère. " Il faut toutefois souligner, que ces conseils s'apparentaient plus à des ordres que nul ne pouvait enfreindre qu'à des pieuses recommandations. C'est l'abbé qui fixe les règles de production et de vente du vin. C'est lui qui nomme les gourmets, intermédiaires entre les vendeurs et les acheteurs ; et il se réserve le droit d'être, à certaines époques de l'année, le seul fournisseur de vin aux auberges de ses territoires. Cela explique que, lors de l'insurrection des Rustauds en 1525, les corporations de vignerons saisissent l'occasion de se venger des humiliations et de secouer la tutelle du prince-abbé : "Les révoltés s'en prirent au monastère des frères prédicateurs, le pillèrent et vendirent ce dont ils s'étaient emparés." Cependant, la rigueur monastique eut aussi ses effets positifs : avec le temps, les vignerons de Bergholtz, réussirent à posséder un vignoble diversifié et exemplaire et acquirent aussi un savoir-faire indispensable à la production de vins de qualité, signale la chronique.
Force tranquille
Le Spiegel, qui signifie miroir en allemand, doit peut-être son nom à sa capacité de capter la lumière du levant et de la réfléchir sur le vignoble au cours de la journée. Mais le miroir est aussi représentation d'une vérité, où l'image du présent synthétise le passé accumulé et l'étendue des espérances futures. Cette image est d'autant plus sereine que le comportement de celui qui se regarde est exemplaire. En ce sens, la démarche des vignerons de Bergholtz s'apparente à une force tranquille qui se réalise dans l'accomplissement du travail bien fait sans fausses prétentions. "Dans le Spiegel, nous respectons les repères fixées par l'expérience tout en cherchant sans cesse à les améliorer. L'essentiel est de bien interpréter les messages de la vigne pour comprendre son adéquation au terroir et de savoir répondre à ses exigences pour satisfaire les critères de qualité", déclare Jean-Jacques Loberger, vigneron-récoltant à Bergholtz. En d'autres termes, cela signifie que le vigneron doit évaluer sur le long terme le potentiel de sa vendange pour définir sa ligne de conduite, car, "dans l'alchimie des grands crus, nul ne détient la pierre philosophale", argumente son collègue François Meyer.
Diversité
" Un grand cru est un vin de culture au sens large du terme, dans lequel ont été assimilées les vertus du terroir, la pureté du cépage et le savoir-faire du vigneron. L'expression peut s'incarner dans la diversité la plus large, mais elle se manifeste toujours dans la finesse et l'élégance ", dit Jean Dirler de Bergholtz. Les vins du Spiegel se caractérisent par leur côté aérien et frais et une belle nervosité qui préserve leurs qualités dans le temps. A ces traits de caractère génétiques viennent s'ajouter les nuances apportées par chacun des cépages. Le riesling combine sa vigueur naturelle avec un bel équilibre aromatique en bouche, le tokay pinot gris associe une certaine rondeur marquée par des notes de coing à une acidité bien maîtrisée. Quant au gewurztraminer, il est sans doute le cépage qui décline le mieux la nature sablo-argileuse du Spiegel au travers de sa minéralité discrète et la subtilité des ses arômes de menthe et de verveine.
L'abbé Braun, "Légendes du Florival"
La RVF, Janvier2006, Février 2006, Mai 2005, Décembre 2004.
Claude Muller « Les vins d’Alsace – Histoire d’un vignoble »
…Et un grand Merci à Alice pour les vins.
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