vendredi 7 décembre 2012

La notion de terroir

L’origine et la découverte du terroir


Le mot « terroir » dérive du latin « terra », mais déjà les Romains l’indiquaient comme « locus » ou « loci », c’est-à-dire un lieu ayant le « genius » destiné à la production d’un produit de qualité exquise. Les Egyptiens, les Juifs, les Grecs et les Romains employèrent en premier le nom du lieu d’origine pour indiquer le vin sur le « pittaccium » en argile qui était apposé sur les amphores en terre cuite qui contenaient le vin. De cette façon, naquit la dénomination d'origine.

Le premier exemple de délimitation géographique et territoriale nous vient de Pline qui avait étudié de façon approfondie le plus ancien cru Romain, c’est-à-dire la Falernum. Le nom de « genius loci » a été encore confirmé pendant le Moyen Age et jusqu.au moment où des règlements et des lois ont établi les premières délimitations de ces lieux. En 1700, fut délimitée par décret la zone de production du Tokay Hongrois, suivie par celles du Chianti (1716) et Porto (1755).

L'essence du terroir fut toutefois exaltée en 1855 à Bordeaux avec la publication de la liste des « crus ». Normalement le mot « cru » se définit comme le participe passé du verbe « croître », c’est-à-dire crû sur ce terroir spécifique mais, selon l'interprétation de certains latinistes d'anciennes abbayes françaises, cela signifie « célèbre », c.est à dire ayant une renommée auprès des consommateurs. C’est justement à travers les « crus » que les français ont inventé le terme « terroir », désormais utilisé dans tout le monde de la viticulture.

La notion de « terroir »

Empiriquement, les agriculteurs ont défini le « terroir » comme étant les zones les plus aptes à produire des cultures de qualité, typiques de ce « terroir ». Ainsi, la sélection des terroirs se faisait a posteriori en « évaluant » les caractéristiques organoleptiques, aromatiques et sensorielles des produits agricoles. Les dictionnaires, quant à eux, donnent toujours deux notions complémentaires pour le mot « terroir » :

- une notion d'espace géographique : étendue de terre ayant des potentialités agronomiques particulières,
- une notion de territoire qui fait allusion à la présence de l'homme, qui seul est capable de valoriser les aptitudes agricoles d.une région.

Ainsi, le concept de « terroir » intègre deux groupes de facteurs fondamentaux : les facteurs naturels (climat, sol, roche) et les facteurs humains. Le terroir est donc un système complexe, constitué d.une chaîne de facteurs (facteurs naturels du milieu, climat du millésime, cépage, facteurs humains d'intervention) allant jusqu’au produit final.

Le terroir, fondement de l'Appellation d'Origine

La loi de 1919 définie l.A.O.C. comme suit : « constitue une appellation d’origine, la
Dénomination d'un pays, d.une région, d.une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus au milieu géographique, comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains ». Ainsi, la notion d'Appellation d'Origine découle de celle du « terroir ». Cependant, à l'échelle de la parcelle, la majorité des Appellations d’Origine sont constituées d’un plus ou moins grand nombre d'unités de terroirs, dont les propriétés peuvent engendrer des différences importantes sur les caractéristiques du produit.


Méthodes d'étude des terroirs viticoles

Approche historico-administrative :
Les vignobles actuels sont le reflet d.une adéquation entre un climat régional, un cépage et un territoire dont les potentialités sont exprimées par des vignerons. Cette adéquation est le fruit de l'observation empirique de plusieurs générations de viticulteurs et le facteur humain est par conséquent déterminant dans ce type de démarche. La théorie du « noyau d'élite » et celle du « noyau historique », considèrent qu'un vignoble possède un noyau central dans lequel les conditions naturelles et humaines sont les plus favorables à la qualité.

Approche statistique :
Plusieurs approches nouvelles, de type croisement multidimensionnel de données numérisées disponibles (banques de données du milieu naturel développées par le Bureau de Recherche Géologiques et Minières), permettent de caractériser les terroirs. L'identification de terroir est réalisée grâce à une ACP (Analyse en Composantes Principales) sur divers critères (pente, exposition, altitude, insolation et lithologie), puis une classification permet l'élimination progressive des unités les plus mal classées. Cependant, cette approche ne traite pas les caractéristiques agronomiques des sols, et les résultats obtenus dépendent beaucoup de la qualité des données de base. Plusieurs chercheurs ont aussi tenté de relier la qualité de la vendange ou du vin à certaines variables d'état (pH, granulométrie, teneurs en calcaire et en éléments fertilisant du sol).

Approche climatique :
Certains chercheurs ont établi divers indices bioclimatiques permettant de caractériser le climat régional. Aussi, d'autres auteurs ont tenté d'aborder le climat à l’échelle ou d'analyser l’effet du millésime sur le développement de la vigne et la qualité de la vendange.

Méthode systémique :
Cette approche prend en compte le fonctionnement de la vigne dans son terroir. Ainsi, des études sont menées dans le Bordelais sur les conditions d’alimentation en eau de la vigne en relation avec la qualité de la vendange et certains auteurs considèrent la chaîne terroir/vigne/vin dans son ensemble.

Méthode de la Chambre d’Agriculture de l’Aude :
Une unité de terroir est définie, dans un bioclimat particulier, par une zone comprenant plusieurs types de sols présentant un ou des points communs majeurs sur le plan des caractéristiques agronomiques (l’élément majeur étant la réserve en eau du sol). Il a aussi été montré l’importance du carbonate de calcium actif dans la typicité sensorielle des vins.

Méthode utilisée pour le fromage de l.A.O.C. Comté :
La première démarche a consisté à vérifier et valider l’existence de crus organoleptiques de Comté grâce à la constitution d’un jury terroir, la seconde a eu pour objectif de rattacher ces crus à une identité terroir en étudiant spatialement les données du milieu naturel s’exprimant dans la chaîne climat, roche, sol et végétation. Les auteurs montrent qu.il existe une corrélation spatiale entre les crus sensoriels de Comté et leurs terroirs et malgré un long parcours technologique, le produit final porte la signature de son terroir.


Méthode d’étude intégrée développée par l’INRA d’Angers
L’Unité de Recherche sur la Vigne et le Vin conduit des travaux sur la notion de terroir, l’effet terroir et son déterminisme, et développe aussi un volet sur l’adaptation de l’itinéraire agro-viticole et au terroir. Pour aborder avec une démarche scientifique ces divers aspects, le concept d’Unité Terroir de Base (UTB) a été élaboré. L.UTB correspond à un territoire suffisamment homogène sur le fonctionnement du système terroir-vigne-vin et présentant une surface suffisante pour la valorisation par la viticulture.

Les divers volets étudiés sont :

- identification, caractérisation et cartographie d.UTB associant trois grandes composantes du milieu naturel (géologique, agro-pédologique, paysage climatique associé)
- caractérisation agro-viticole multicritères des UTB
- caractérisation analytique des vendanges et des vins
- étude du déterminisme de l’effet terroir pour dégager et hiérarchiser les variables pertinentes
- recherche sur l’adaptation de l’itinéraire agro-viticole et œnologique à l’UTB
- valorisation par l’élaboration d’un référentiel cartographique informatisé directement utilisable par le vigneron.

Conclusion
La notion de terroir est complexe car elle résulte d’une multitude de facteurs ayant des interactions complexes entre eux. Aussi, les méthodologies d’étude des terroirs sont très variables en fonction de la région étudiée et du but de l’étude.
Le but est d’acquérir une meilleure connaissance et maîtrise des caractéristiques sur les différents terroirs. Ainsi, il est indispensable d’étudier en détail les facteurs environnementaux, pédologiques et climatiques qui caractérisent le mieux les différents terroirs étudiés.

Source :
THESE « LE TITRE DE DOCTEUR DE L’INSTITUT NATIONAL POLYTECHNIQUE DE TOULOUSE » Spécialité : Sciences Agronomiques par Mlle CADET Alexandra

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