mardi 15 mai 2012

Las Vegas une main gagnante pour le vin et la gastronomie

Après mon expérience du Grand Tour du Wine Spectator, mon séjour à Las Vegas devenait un prétexte pour continuer mon expérience gustative en profitant de la présence des grands hôtels de la Strip pour essayer des restaurants.   N’étant pas un joueur né et ayant une aversion pour les cartes et jeux de hasard, disons que la présence des casinos n’était pas une distraction pour moi à Las Vegas.

C’est plutôt la bonne bouffe et le bon vin qui m’ont fait engloutir quelques dollars durant mon séjour. Je me suis rendu à L’Aureole au Mandalay Bay, au Dal Toro dans l’enceinte du Venetian et Palazzo, ainsi qu’au Jaleo au Cosmopolitan.  Un peu plus loin, je reviendrais sur ces soirées gourmandes, mais auparavant je souhaite vous faire découvrir l’ampleur du phénomène Vegas avec le vin et la gastronomie.
La fameuse tour de l'Aureole

Vegas sans complexe gastronomique…et pour le vin :
À titre d’exemple il y a seulement 3 sommeliers au Canada ayant le titre de Master Sommelier.    Las Vegas aurait 15 Master sommelier alors que le pays en entier des États-Unis en compterait 105.  (Source:  Go AirTran Magazine octobre 2010)  Pour le majestueux Bellagio, il y en a trois sous le même toit.  Joe Phillips est d’office au restaurant Michael Mina. Michael Smith est au Picasso et Jason Smith est aussi Master sommelier en plus d’agir comme directeurs des vins pour l’établissement. Une équipe de 17 sommeliers travaillent au Bellagio et dont les celliers des différents restaurants renferment pas moins de
60 000 bouteilles, offrant du même coup  5,250 sélections et plus de 250 vins au verre.  Le chiffre annuel des ventes en vins dépasse les 38 millions de dollars.

Un autre hôtel bien connu de la Strip est le Venetian qui est avec le Palazzo le plus impressionnant complexe hôtelier de Vegas.  Ouvert depuis 1999, ce superbe hôtel situé face au Treasure Island compte à lui seul plus de 36 restaurants.  Au début 2008, le complexe est devenu le plus grand hôtel du monde avec plus de7000 chambres.

L’hôtel Cosmopolitan offre pas moins de 13 restaurants et parmi les plus populaires il y a le STK, le Comme ça, le Jaleo, le D.O.C.G. , The Henry et le Scarpetta.  Le D.O.C.G a certainement retenu l’attention de mon œil d’amateur de vin alors que la liste des vins dépasse les 20 pages et des bouteilles qui demandent une limite assez grande sur votre carte de crédit alors que le Château Lafite Rothschild, un Pauillac 1982 dépasse les 14,000 dollars. 

Las Vegas brille par ses restaurants et ses cartes de vins de rêve. Pour preuve, il y avait 75 établissements ayant reçu du Wine Spectator le fameux Grand Award winning restaurants à travers le monde et au moins 6 sont situés à Las Vegas.  33 des 788 établissements avec la mention Best of Award of Excellence restaurants sont aussi localisés à Las Vegas.

L’Aureole : un ange s’occupe de votre bouteille
Lors de nos sorties gourmandes de Vegas, ma conjointe et moi avions décidé de nous offrir le fameux restaurant de Charlie Palmer, soit l’Aureole situé au Mandalay Bay.  Ce restaurant se démarque par sa tour en verre de 42 pieds qui domine l’établissement avec la particularité que ce sont deux femmes qui agissent comme des anges pour aller cueillir les bouteilles de votre choix.  Les «wine angels» sont suspendues par un système sophistiqué de suspension à la manière d’une scène du film Mission Impossible pour gracieusement y récupérer la bouteille convoitée. Une vaste sélection de plus de 5000 vins se retrouve dans cette tour à la température contrôlée. La carte des vins est disponible sur une tablette (style Ipad)  à partir de laquelle vous pouvez passer votre commande. Une rare collection du millésime 1900 du prestigieux Château Pétrus figure sur la carte de vins dont le prix est à plus de 42,000$.  C’est d’ailleurs à l’Auréole ou j’aurais possiblement goûté mon meilleur filet mignon à vie.  Nous avions accompagné le tout d’une bouteille de Pinot Noir Au Bon Climat de la Californie à 60 dollars.  Bien que nous ayons aussi ouvert notre soirée avec un verre d’Albarinos à 12 dollars chacun, c’est la bouffe qui a fait gonfler la facture à plus de 300 dollars pour ma conjointe et moi-même.  Ça valllait le prix d’un spectacle sur la Strip.
On se fait plaisir aussi avec les yeux

La Jaleo : le paradis des Tapas :
Un autre restaurant qui retenait mon attention pour son aspect tendance est celui du chef José Andres soit le Jaleo situé au Cosmopolitan à deux pas du D.O.C.G.  Nous voulions terminer notre périple à Vegas sur une bonne note et pourquoi pas avec une saveur latine.   C’est donc sur la recommandation de quelques amis que nous nous sommes laissés aguicher par les créations du chef ayant été entrainé par le réputé chef Ferran Adria du El Bulli.  Le Jaleo est présent dans trois autres locations soit Washington, D.C.; Bethesda, au Maryland et  Arlington en Virginie.  Le nom Jaleo a été choisi en hommage à une peinture de John Singer Sargent. Malgré le fait que ce soit de petites créations, il faut se méfier car plusieurs petits plats à des prix moyens finissent par faire aussi une belle facture.   La carte des vins offre une excellente sélection de vins d’Espagne au verre. 

Le concept ouvert de la cuisine du Jaleo,
le royaume des tapas
Le Dal Toro : des mets italiens et des voitures de luxe
Une autre belle soirée que nous avons partagée autour d’une table attrayante aura été notre passage au Dal Toro situé au Palazzo face au Treasure Island.  Bien que ce restaurant ne soit pas dans la liste des restaurants au rang prestige du complexe Venetian/Palazzo, j’ai adoré ce restaurant.  Un peu plus abordable autant pour ses mets que ses vins, le Dal Toroséduit par son ambiance et notamment par sa terrasse externe qui donne sur la Strip.  Le Dal Toroest aussi remarquable pour son décor agrémenté par une collection de voitures de sport à l’intérieur de ses murs dont Lamborghini, Aston Martin et Porsche.  La nourriture est excellente et si vous êtes un amateur de carpaccio vous ne pourrez résister à ce plat bien présenté.  Nous avons aussi adoré la carte des vins malgré le fait que ce n’est rien de comparable avec les restaurants visités précédemment.  Juste avant d’aller voir un des nombreux spectacles, cet établissement représente un choix intéressant.

La distinction Cinq Diamants bien présente à Vegas
La plus haute distinction en matière de restauration telle que décernée par l’organisation American Automobile Association est à l’honneur à Las vegas. La ville de Las Vegas comprend désormais quinze complexes hôteliers et restaurants récipiendaires du Prix Cinq Diamants de l’AAA, soit le nombre le plus important pour une ville aux États-Unis.  Les restaurants récipiendaires du Prix Cinq Diamants à Las Vegas, pour plusieurs années consécutives, comprennent le restaurant Alex du Wynn Las Vegas, le restaurant Guy Savoy du Caesars Palace, le restaurant Joel Robuchon du MGM Grand, le restaurant Picasso et Le Cirque de l’hôtel Bellagio. À titre d’exemple, l’Aureole est récipiendaire de la mention Quatre Diamants depuis son ouverture en 1999.

Sur les 6,7 km de la Strip, il y a donc une multitude de restaurants à découvrir dans cette ville qui ne dort jamais.  Malgré le fait que nous ayons été 6 jours sur place, je suis convaincu qu’il faudra plus qu’un séjour pour découvrir les différentes facettes de la gastronomie de Las Vegas. Il n’en tient qu’à vous maintenant de découvrir l’endroit qui fera le bonheur de votre palais et de vos papilles gustatives. Viva Las Vegas comme dirait le King!

Une affaire de famille


La vigne, chez les Ledogar, c'est une histoire de famille. Ce jour-là, à Ferral-les-Corbières, trois générations sont donc rassemblées pour l'événement: le retour du cheval au milieu des Carignans blancs. Sous les amandiers en fleurs, les frangins Xavier et Matthieu débarrassent les souches mortes. Tandis que leur père André et Pierre, le grand-père, assistent au spectacle.
"Mon grand-père est incroyable, s'émerveille Xavier. Il ne résiste jamais à l'envie de nous aider. A 94 ans, il faut le voir tourner autour des ceps. La souche, c'est son obsession. Il aime la former, la tailler. Encore aujourd'hui, il a l'oeil juste et le geste sûr. C'est lui qui m'a transmis le respect de la plante et l'amour de la nature".
A l'époque de ce vétéran de Boutenac, pratiquement chaque vigneron avait son cheval. On imagine mal - et il n'en dira rien... - l'émotion qui a saisi le vieil homme lorsque l'attelage est revenu pour la première fois dans ces vignes. Au milieu de ces vénérables carignans qui sont les seigneurs du Grand Lauze... Même si travail est réalisé par un laboureur du Minervois, Pierre a de la fierté à voir les petits-fils retrouver ces chemins délaissés.
"On a labouré en mars, explique Xavier. Maintenant on "décavaillonne" (on retourne la terre sur le rang, entre les ceps, pour désherber "naturellement", ndla). Ces carignans méritent bien ça. D'autant qu'on leur demande beaucoup. Ici, le climat est méditerranéen. Sec. Assez rude. Le sol est peu fertile. Ça favorise l'expression du cépage, bien sûr. Mais à condition de laisser la terre respirer."
Le père Ledogar, lui mesure le chemin parcouru depuis qu'il a laissé les rênes à ses fils, il y a dix ans. Et se souvient sans doute de ses réticences à voir les deux "jeunes" entrer dans les vignes avec leurs "drôles d'idées".
"C'était pas une sinécure, rigole le vigneron en adressant un regard au paternel. Mon père faisait du raisin, pas du vin. Il ne comprenait pas pourquoi on réduisait autant les rendements. 15, 30 et même 40 hecto-hectares sur des carignans, ça lui semblait ridicule. Forcément... Lui vendait des raisins au kilo. Le résultat final, la qualité du vin, c'était pas son soucis. Ca, il a fallu l'imposer, on peut le dire..."
Depuis les trois générations besognent main dans la main. Et le résultat est là. Des vins expressifs, charnus, généreux... Mais exigeants. Ainsi, une fois l'oeuvre du cheval accomplie, il faut attendre que la Tramontane vienne sécher le sol et les ceps. D'ici là, les Ledogar s'interdiront de venir "buter" (refermer la terre sur le rang) les jours humides ou en matinée. Ils risqueraient de favoriser la dispersion du mildiou ou d'un oïdium de plus en plus féroce. Au Grand Lauze, pas question de transiger sur les principes. Ce qui, on l'a compris, n'est pas pour déplaire au grand-père.

On peut retrouver la "saga" des Ledogar sur leur site: Domaine du Grand Lauzes.

Le Benjamin de la bande

C'est l'histoire d'un coup de coeur. Le coup de foudre d'un fils de médecin pour quelques hectares de vieilles vignes, au dessus de Villeneuve-Minervois.
"Je suis tout de suite tombé amoureux de ces Grenaches, raconte Benjamin Taillandier. Elles étaient fantastiques, au milieu des garrigues, sur des schistes magnifiques. Les plus vieilles ont 90 ans. Elles appartenaient à un vieux qui allait les arracher (voir "Arrachage et vieilles rengaines", ndla). "Je vais prendre ma retraite m'a-t-il dit, je n'ai que des filles (sic), qu'est-ce que tu veux que j'en fasse?". Sur un coup de tête, j'ai répondu: "me les vendre". Il a dit chiche. On était en novembre. A Noël, je commençais à les travailler..."
... A crédit.

C'est que si Benjamin a la passion du vin et un BTS "viti-oeno" en poche, ses parents viennent de la ville. Il n'y a jamais eu de vignes dans la famille. C'est une "pièce rapportée" comme on dit dans ces campagnes où l'on ne se mélange guère. Peu importe. A 27 ans, le jeune homme plaque tout, quitte son boulot dans un grand domaine du Frontonais et décide de tenter l'aventure. Sans se laisser impressionner par le peu d'enthousiasme de ceux qu'il rencontre:
"Ça a été un vrai parcours du combattant. Les banques, la Chambre d'agriculture... La course aux subventions. A l'Audasea, l'organisme censé aider les jeunes à s'installer en montant les dossiers, on m'a carrément expliqué qu'on ne croyait pas à mon projet, parce que je n'étais pas fils de vigneron. Ils étaient effrayés de me voir envisager de vendre mes vins 5 euros. Pour eux la cible d'un vigneron qui s'installe, c'est le supermarché. Et des bouteilles aux alentours de deux euros, pas plus.".
Oui, mais à ce prix là, dit-il, impossible de passer du temps sur ses vignes, il faut aller vite. Et fort. Tout ce dont Benjamin ne voulait plus.
"J'avais eu l'expérience des traitements systématiques, des levures industrielles et des vendanges mécaniques. Ce n'est pas mon truc. Je ne veux d'artifice ni en vigne, ni en cave. Même s'il faut avoir l'oeil à tout, à l'ancienne, la vigne se suffit bien à elle-même."
Un coup de pouce des parents, un prêt à 1%, les Assedics... Et le voilà lancé. Contre vents et facheux précédents.

A ses Grenaches et ses Syrahs, qu'il couve amoureusement, il ajoute vite trois hectares de Cinsault, de Carignan et de Terret Gris, un vieux cépage oublié dont il espère faire un blanc. Puis des Grenaches et des Syrahs encore, mais du coté de Caunes cette fois. Le tout en fermage. Pour une bouchée de pain, il obtient de la mairie une vieille remise. Et, bien sûr: il réquisitionne toutes les bonnes volontés. Les parents, les cousins, les amis participent aux premières vendanges, au "décavaillonage", aux premières mises en bouteille. Ils donnent aussi la main pour retaper la "cave",
qui servira à accueillir les touristes.
"Elle est juste en face de l'Abbaye de Caunes, rigole-t-il. Ca le fait, non?"
Au village, les vieux rigolent, sceptiques mais bienveillants. C'est que Benjamin a grandi ici. Du terrain de foot au bistrot, il fait, malgré tout, un peu partie de la famille. Simplement, les retraités de la vigne trouvent le jeunot bien ambitieux avec ses techniques à l'ancienne et ses idéaux de terroir. Lui, persite. Mais ne cache pas qu'il a longtemps eu la peur au ventre:
"C'est vrai que j'ai passé une année un peu rude. Avec mes Assedics et mes emprunts. Parce que je joue gros, hein, faut pas croire! Je commence seulement à bien dormir maintenant que j'ai commencé à vendre mes bouteilles. Évidemment, là, je ne me paie pas, mais j'ai pas besoin de grand chose".
Un brin provoc, Benjamin a baptisé "6 Roses" son rosé de syrah. Plus classique, son premier rouge fruité a été baptisé Laguzelle, comme le lieu-dit sur lequel poussent ses Grenaches. Cinq euros tous les deux, comme promis, pour des vins très éloignés des Minervois charpentés qui ont fait la réputation du cru.
"Je voulais des vins faciles, je les ai. Mais les deux autres cuvées, assure Benjamin, seront plus structurées. Le "Viti, vini, bibi" (Grenache, Cinsault et Carignan, 7 euros) attend en cuve. Et puis il y a mes Grenaches et mes Syrahs qui attendent en barrique pour le premier millésime de "Bufentis" (le nom latin de Caunes-Minervois, ndla)."
Gourmand, il vous parle déjà de ses vins en vieux briscard. Vante leur fraîcheur, leur finesse et leurs tannins fondus. Très vite, il vous invite à passer le voir pour une de ces soirées tapas qu'il organisera cet été, "histoire de faire connaître (son) travail". Déjà, il rêve de monter un peu ses rendements (30 hecto/h, pas plus) pour arrondir sa production (14.000 bouteilles seulement) et ses fins de mois. Il sait pourtant que la partie n'est pas gagnée.

Et si ça ne marchait pas, insiste-t-on?
"Il faut que ça marche, répond-il. J'ai pas le choix. Je fais ce que j'ai toujours rêvé de faire. Et puis, je ne me vois pas retourner avec un patron. Non... Ça va marcher!"
Les petits nouveaux, décidément, ne manquent pas de toupet.