jeudi 6 décembre 2012

La Métaphore en Œnologie

1. Statut de la terminologie œnologique

Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles. C’était un vin délicat, féminin, séduisant, Avec une robe vive et brillante

Le vers de Baudelaire par lequel commence cet article semble bien se compléter par les mots qui lui succèdent. Seulement que dans le premier cas on voit à l’œuvre le génie poétique et dans le deuxième la réflexion analytique sur les sensations dans un langage de spécialité: celui de l’œnologie. Ce qui frappe ici, c’est le lyrisme de ce dernier, qui consiste dans l’emploi métaphorique de certains termes du français général. Pierre Poupon a surpris cette spécificité du langage de l’œnologie dans un discours non moins lyrique:

“D’approximations parfois brillantes et imagées comme une improvisation poétique, le Profane ne retient que le souvenir d’une élégante jonglerie verbale autour d’un verre. Il s’agit En fait d’un encerclement progressif et sincère, pour serrer de près l’insaisissable vérité.”
(Peynaud).

La “jonglerie verbale” et le jugement trop familier porté sur le vin dans ses espaces culturels de souche sont peut-être la cause pour laquelle le vocabulaire de l’œnologie n’est pas pris au sérieux.
En fait, la description des sensations olfactives et gustatives est difficile à réaliser, car le nombre des termes conventionnels dont dispose la langue pour le faire est plutôt restreint.
Le gastronome Brillat-Savarin nous a légué par sa Physiologie du goût de 1826 les quatre saveurs fondamentales que la langue distingue et que nous sommes éduqués à percevoir:
Le sucré (doux), le salé, l’acide (aigre), l’amer (amertume). A la différence des “profanes”, l’œnologue doit posséder un vocabulaire gustatif beaucoup plus étendu pour qualifier chaque composante du vin dans ses nuances (hormis le salé, qui intervient rarement). A titre d’exemple, selon l’astringence, due aux tanins, le vin sera informe, charpenté, ferme, grossier, etc. Pour surprendre les subtilités d’un vin et pour que la communication entre spécialistes soit efficace, l’œnologie a dû se forger une terminologie propre, descriptive et précise.

Les langages de spécialité sont communément décrits en termes de monosémie, bi-univocité, neutralité émotive (Jacobi) ou bien précision, simplicité, clarté, objectivité (Hoffmann).
Ces exigences semblent exclure l’emploi du langage figuré de la communication entre les spécialistes. Celui-ci tend à être considéré prioritairement dans sa dimension esthétique et émotive, en vertu de son rattachement traditionnel à une rhétorique confinée au champ littéraire.

Au pôle opposé se trouvent ceux qui voient dans l’effervescence métaphorique un moyen de remédier aux lacunes terminologiques (Black).

Black et Boyd, analysant les métaphores sous l’angle de la philosophie de la science, vont au-delà du rôle de ce trope dans la constitution des terminologies. Ils mettent en évidence le rôle cognitif (la valeur heuristique) des métaphores dans l’élaboration et la formulation des théories scientifiques. Nous avons retenu ici les contributions de Black et Boyd seulement comme argument pour l’utilité de la métaphore au niveau terminologique.

Black définit ces métaphores-outils comme des catachrèses. C’est d’ailleurs le type de métaphore présent dans le langage de l’œnologie, où, par exemple, le corps, la charpente, la robe du vin sont des termes non-substituables dont le sens d’origine n’est plus perçu. Boyd considère les métaphores scientifiques comme :

“an irreplaceable part of the linguistic machinery of scientific theory [...] there are
metaphors which scientists use in expressing theoretical claims for which no
adequate literal paraphrase is known” (Boyd).

Il les appelle métaphores constructives parce qu’elles “ construisent ” les théories exprimées et font avancer la recherche en révélant des analogies entre des concepts appartenant à des domaines différents (ex. la métaphore cerveau / ordinateur dans la psychologie cognitive).

Ce n’est pas le cas des métaphores de l’œnologie, qui n’offrent pas d’insights cognitifs contribuant à l’avancement des recherches. Ce sont seulement des métaphores constitutives d’une terminologie.
La métaphorisation des termes du langage ordinaire représente l’un des procédés dont se servent les langages de spécialité pour combler les vides dénominatifs, à côté de la spécialisation du sens et de la néologisation.
A la différence des langages de l’économie, de l’informatique, de la médecine, etc., qui usent de tous ces procédés, celui de l’œnologie se sert presque exclusivement de la métaphorisation.

Ce qui est commun à toutes ces terminologies, c’est le fait qu’elles sont truffées de métaphores provenant du français courant (ex. en économie - conquérir un marché, dépression économique; en informatique - fenêtre, souris; en génétique - carte génétique, gène d’intérêt).

Empruntés à la langue courante, ces termes ont l’avantage d’être transparents, synthétiques et concrets. Cela les rend parfaitement appropriés à l’œnologie, qui s’attache, dans la pratique de la dégustation, à cerner et à communiquer le vague d’une expérience sensorielle.


2. Base théorique de l’approche de la métaphore

Vu les nombreuses études sur la métaphore, il est bien nécessaire de mettre au point une démarche méthodologique en décelant la théorie qui convient le mieux à notre analyse.
L’approche diachronique de la métaphore relève l’existence de deux directions principales:
- l’approche traditionnelle, qui traite la métaphore comme phénomène essentiellement linguistique;
- l’approche engendrée par l’avènement des sciences cognitives, qui envisage la métaphore comme phénomène cognitif (Lakoff et Johnson).


L’approche traditionnelle explique la métaphore en termes d’anomalie, de comparaison et d’interaction.

- La théorie de la métaphore comme anomalie se fonde sur l’impossibilité d’interpréter la phrase dans ce qu’elle affirme directement. Cela suppose l’existence d’un équivalent littéral auquel on fait recours pour la compréhension de la métaphore, qui a dans ce cas une fonction substitutive. Ce n’est pas le cas des métaphores de l’œnologie, forgées justement pour combler les lacunes terminologiques.

- La théorie de la comparaison, qui se réclame d’Aristote, interprète les métaphores comme des comparaisons implicites (nommées abrégées ou elliptiques). La comparaison est rendue possible par l’existence des traits sémantiques communs entre les deux composants de la métaphore. Les éléments de ressemblance constituent le ground.

Cette théorie ne peut pas être appliquée à l’analyse des métaphores œnologiques, car elle suppose que le trope surprend des traits communs préexistants (qui sont d’ailleurs responsables de sa constitution). Or il n’y a aucune ressemblance a priori entre, par exemple, le corps du vin et le corps humain, pour qu’elle soit enregistrée dans la métaphore le corps du vin.

- La théorie interactionnelle, mise en place par Black, considère que la métaphore
consiste dans la projection sur le topic non seulement d’une propriété unique, mais d’un ensemble d’implications (connaissances, croyances), conventionnellement associées au vehicle. Cette projection résulte dans une reconsidération des deux composants de la métaphore la compréhension de chacun étant approfondie par le transfert d’un faisceau de propriétés de l’autre.

Les métaphores de l’œnologie pourraient être envisagées seulement en partie comme
interactionnelles. Le vehicle “corps” transfère sur le topic “vin” une série de propriétés (ex. chair, maigre, gras), en l’anthropomorphisant. En échange, le topic “vin” ne contribue en rien à une nouvelle compréhension du corps humain.

L’approche cognitive de Lakoff et Johnson envisage la métaphore non pas comme fait linguistique, mais comme phénomène cognitif. Son foyer n’est pas la langue, mais la pensée.
On la retrouve dans notre façon d’organiser les connaissances, de comprendre un domaine conceptuel en termes d’un autre: “La métaphore n’est pas seulement affaire de langage ou question de mots. [...]

Le système conceptuel humain est structuré et défini métaphoriquement. Les métaphores dans le langage sont possibles précisément parce qu’il y a des métaphores dans le système conceptuel de chacun.” (Lakoff et Johnson).

On retrouve ici quelques principes de la théorie interactionnelle, dont l’approche cognitive constitue l’aboutissement: l’idée du filtrage d’un système sémantique à travers l’autre, qui débouche sur une nouvelle organisation conceptuelle du topic (la fonction heuristique de la métaphore). En plus, la théorie interactionnelle ne s’en tient pas au transfert de propriétés sémantiques, mais de tout un système d’implications associées au topic et vehicle. La compréhension consiste donc dans l’activation des domaines conceptuels sous-jacents au topic et au vehicle. Selon Lakoff et Johnson, la métaphore peut être décrite comme une série de mappings (fr. mappage ou mise en correspondance) entre un domaine-source et un domaine-cible (vehicle, respectivement topic dans la théorie interactionnelle).

La différence entre les deux approches consiste dans le fait que dans pour les cognitivistes la pensée n’intervient pas seulement dans l’interprétation de la métaphore. C’est la pensée même qui est structurée métaphoriquement. L’expression linguistique métaphorique est la réalisation de surface d’une structure conceptuelle qui la sous-tend.

3. Analyse des métaphores œnologiques


Fondée sur l’approche cognitive de la métaphore, notre analyse se propose de rendre compte du domaine-source en termes duquel on conceptualise le domaine-cible VIN. La systématisation des métaphores conceptuelles et l’investigation de leur motivation seront complétées par une analyse sémantique, dans la lignée traditionnelle. Celle-ci vise, par la description du mécanisme de la métaphorisation, à refléter la façon dont le système sémantique du topic a été réorganisé, en le rapportant à celui du vehicle.

Le corpus d’analyse a été sélectionné des sites dédiés à l’œnologie ainsi que de deux
dictionnaires de spécialité, car cette pittoresque terminologie n’est pas représentée dans les dictionnaires généraux de langue française. Elle st confinée aux glossaires à vocation didactique.
Les termes métaphoriques repérés dans ce corpus sont de différentes actualisations
linguistiques de la même métaphore conceptuelle: LE VIN EST UNE PERSONNE, avec ses différents sous-domaines. Nous allons analyser seulement les multiples aspects concernant l’être corporel, sans oublier pour autant de mentionner que l’étude des traits de personnalité et de caractère serait tout aussi effervescent (vin aimable, chaleureux, franc, généreux, etc.).


3.1. CONSTITUTION DU CORPS HUMAIN=CONSTITUTION DU VIN

Le choix de cette correspondance conceptuelle a été déterminé par des syntagmes comme : le corps du vin, la chair du vin, vin charnu, charpenté. De tous ces mots du langage courant spécialisés en œnologie il n’y a que corps qui figure dans les dictionnaires de français général
avec une référence explicite au vin. Dans l’organisation du sens de corps, on peut dstinguer quatre branches correspondant aux sèmes nucléaires :

s1 /partie matérielle des tres/,
s2 /matière/ ou /substance/,
s3 /partie principale/,
s4 /ensemble/.

Le seul sème actualisé ans la métaphore est s2, susceptible à son tour d’une décomposition dans les sèmes contextuels /consistance/, /épaisseur/. Dans le cas du vin, ces sèmes contextuels sont traduits pr “vigueur, plénitude en bouche (d’un vin). Avoir du corps. ”.

Les glossaires spécialisés soulignent aussi la plénitude et la densité comme sensation gustative : “plénitude, richesse aromatique ; le vin est dense et complet, son goût envahit la bouche” ; ou bien ils s’apprêtent à décoder une métaphore par une autre : “bonne constitution (charpente, chair)”. Cette sensation gustative de plénitude est procurée par l’équilibre des composants du vin : l’alcool, les tanins et le moelleux (ou la sucrosité). Un vin qui n’a pas ces qualités est maigre, informe.

Le passage du corps en œnologie a déterminé un comportement similaire de certains lexèmes qui structurent son champ sémantique : les noms charpente, chair et surtout les adjectifs charpenté et charnu. Dans leur sens littéral, les deux adjectifs envisagent un sujet caractérisé par les sèmes /+concret/, /+humain/ : “
Qui est robuste, qui a une bonne charpente osseuse. Il est petit, mais bien charpenté.”
Nous nous situons donc premièrement dans la sphère de l’humain, pour qu’ensuite l’adjectif puisse être appliqué à tout sujet /+concret/, /-humain/,:

Solidement construit, bien structuré. Un roman bien charpenté.” En œnologie, un vin (bien) charpenté est un vin “qui a une bonne constitution, avec une prédominance tannique ouvrant de bonnes possibilités de vieillissement”. Dans cette définition professionnelle il y a un implicite anthropologique du domaine-source :
une bonne constitution et un indicateur pour la santé et la force - la garantie du “vieillissement”, de la longévité.
En ce qui concerne l’adjectif charnu, il est défini dans son premier sens par référence au corps humain : “Des lèvres charnues”, “Les parties charnues du corps”. Ses collocations reflètent clairement les sèmes /+concret/, /+humain/, pour qu’ensuite ce dernier soit remplacé par /+végétal/ : “Des cerises épaisses”. Cette extension du sens vers la sphère végétale a été dictée par les sèmes /+épaisseur/, /+consistance/, caractéristiques tant pour le corps humain que pour les fruits. D’ici la catachrèse chair d’un fruit rénovée par l’œnologie dans la chair du vin. Un vin ayant de la chair, donc charnu, donne une sensation gustative presque "charnelle" de forme et de volume, tellement qu’on a l’impression de devoir le mâcher (d’où l’expression avoir de la mâche).

Tous ces termes sont entrés en œnologie de la langue commune à la suite d’un processus de métaphorisation. Il y a quand même un cas à part : celui de corsé, adjectif désignant un vin qui a une saveur prononcée, “un goût relevé” . Dérivé de corps (a.fr. cors), corsé est attesté pour la première fois en 1819 avec le sens de “consistance que prend un liquide qu’on épaissit” (Bloch et Wartburg ). Le verbe correspondant, corser, a comme sens propre “donner du corps en additionnant d’alcool. Corser un vin.” Forgé donc pour parler du vin, ce terme a été emprunté par la langue commune sous une forme qui n’est pas sa figure naturelle. Ainsi, il a comblé un vide dénominatif dans des syntagmes du genre corser un récit,
pour éviter la paraphrase “renforcer l’intérêt de quelque chose en ajoutant des détails”. De même, on dit corser la note pour “en gonfler le total”, expression ayant comme homologue familier saler la note. Tous ces emplois figurés sont dus au sème saillant commun /+ajout/.
Parmi les traitements sémantiques de la métaphore, c’est le modèle interactionnel de Black qui convient mieux aux syntagmes analysés. Comme le fait remarquer Georges Kleiber, “Une des hypothèses centrales de la solution interactionnelle est que le mécanisme métaphorique consiste en l’interaction ou tension entre une expression employée métaphoriquement (le foyer ou véhicule) et les termes co-occurrents (le cadre ou teneur) dans leur emploi littéral.” (Kleiber). En nous situant dans la même lignée, nous pouvons affirmer qu’une métaphore est d’autant plus puissante que l’incongruité des champs sémantiques juxtaposés est grande. Même si l’analyse sémique du lexème vin relève du trait sémantique /+liquide/, les termes liés à la métaphore du corps témoignent de l’investissement du domaine-cible VIN d’un sème s’opposant à sa structure inhérente: /+solide/. Le vin a de la consistance, mais il s’agit d’une consistance qui frappe par son "immatérialité". Elle est donnée par un ensemble de saveurs, d’arômes, donc de sensations gustatives. Une information de nature chimique (le goût) est décrite, par synesthésie, dans les termes du toucher, qui reçoit des informations de nature physique (ex. “plénitude”, “vigueur”, “sans aspérité”). Ces choix linguistiques métaphoriques, même s’ils se situent loin dans le temps (on retrouve le corps du vin dans le Dictionnaire de l’Académie française de 1694, mais il est sûrement plus ancien), pourraient cacher une prémonition scientifique: la transgression des barrières entre les sens.

C’est cette observation qui a permis aux informaticiens de créer des logiciels qui convertissent les images en sons pour rendre "la vue" aux non-voyants. La générativité de la métaphore du corps ne se réduit pas pour autant aux éléments qui entrent dans sa constitution – charpente et chair. Elle entraîne dans le vocabulaire de l’œnologie toute une série d’attributs physiques pour rendre des défauts ou des qualités du vin.


3.1.1. Défauts du vin

Pour caractériser en général un vin sans qualités on dispose des adjectifs tels faible, fatigué, maigre, mince.
Faible envisage dans son sens propre un sujet /+humain/ . D’ailleurs, le latin flebilis
signifiait “digne d’être pleuré ” (du verbe flere, "pleurer"). Il s’agissait donc d’un sentiment de compassion éprouvé par un être humain envers ses semblables. Pour les oenologues, un vin faible manque de couleur, de corps et d’extrait sec ou bien il n’a pas assez d’alcool,
pendant que son antonyme fort réfère seulement à la richesse alcoolique.
De façon plus évidente encore, fatigué s’applique aussi à une personne. L’homme est fatigué à la suite d’un excès d’activité physique. Le vin est fatigué quand il a perdu provisoirement ses qualités à la suite d’un soutirage, d’un filtrage ou d’un transport – il a été donc "travaillé".
Ou bien la sensation de fatigue est due à des causes internes, physiologiques : le
vieillissement. Puisque le vin a aussi une existence (il est jeune, mûr, vieux, sénile), il ne pouvait pas échapper à la créativité lexicale engendrée par une telle conceptualisation. Ainsi, pour d’autres dégustateurs, fatigué qualifie un vin auquel l’âge a enlevé ses qualités. En tant qu’attributs du corps humain, maigre et mince sont presque synonymes, ayant le sème commun /-gros/. Cependant, mince est investi de la connotation /+élégant/. Les deux termes sont importés en œnologie avec cette différence de nuance. Un vin mince est un vin dont l’alcool, le bouquet et le goût sont peu intenses, tandis qu’un vin maigre manque de corps, il a une minceur exagérée.


3.1.2. Qualités du vin

Comme caractéristiques physiques, maigre-gras représentent des défauts de constitution :
manque, respectivement excès. Le couple antonymique se conserve en œnologie avec la différence que gras ne désigne plus une imperfection. Un vin gras est riche en glycérine, qui lui apporte du moelleux (une saveur légèrement sucrée, avec une certaine onctuosité). Selon le Grand Dictionnaire Terminologique, gras signifie “souple, agréable, moelleux, presque onctueux”. Le terme utilisé par les Grecs pour un tel vin était liparos (cf. lipide). Si la couche lipidique en excès donne au corps humain une apparence grasse, cela est dû aussi à l’apport nutritif excédentaire de glucides. La même chaîne causale se révèle dans le cas du vin, rendu gras par la glycérine (pas excédentaire). Même si l’adjectif réfère à la constitution du vin, la
motivation de son choix est plutôt de nature visuelle : les traces qu’un vin gras laisse sur les parois du verre sont épaisses (des larmes épaisses), comme celles laissées par l’huile.
Contrairement au français général, le lexème perd son sens dévalorisant (synonyme
d’agréable). En outre, le rapport antonymique gras-souple devient synonymique, gras s’opposant à sec. Le vin souple présente un équilibre excellent entre alcool et acidité, de même qu’une certaine proportion de glycérine naturelle. Le principal critère de qualité des vins est l’équilibre entre ses éléments constitutifs: acidité, sucré, astringence (pour les vins rouges) et alcool (pour les vins blancs). Dans le cas du vin gras/souple aucun élément n’est en excès et il procure au palais une sensation agréable.

Puisque le vin a du corps et de la charpente, il était tout naturel qu’il soit qualifié de robuste, adjectif passé en œnologie avec sa série synonymique: fort, puissant, solide, vigoureux. Ces qualités physiques sont attribuées à un vin riche en alcool. Mais ce choix terminologique ne doit pas être considéré seulement comme une métaphore filée engendré par celle du corps. Sa source remonte aux origines de l’humanité. L’imaginaire collectif qui associe le vin à la force et à la santé puise ses représentations tant dans les cultes païens que dans la tradition chrétienne. Dans les mythologies grecques et latines, le vin était la boisson des Dieux. Il avait
donc une valeur sacrée, celle de breuvage de l’immortalité. Un symbolisme plus fort encore est institué dans la Bible. Le Messie est la vraie vigne, plantée par son Père, soignée et émondée pour donner un fruit abondant. Le fruit de la vigne, le vin présent dans l’Eucharistie, représente le sang versé pour la nouvelle Alliance. La communion est notre chance récurrente d’acquérir la santé spirituelle et corporelle, notre chance de rejoindre le principe de la vie éternelle.

Tout en rappelant l’hétérogénéité symbolique du vin, il faut préciser que le profane (le corporel) l’emporte sur le mystique (le spirituel). Les vertus thérapeutiques du vin (et en général de l’alcool - voir eau-de-vie) sont reconnues et régulièrement exprimées dans les repas conviviaux par la formule “A votre santé!”. Cette boisson alcoolique est souvent consommée sous le prétexte qu’elle donne de la force. La réciproque est aussi vraie : boire est une preuve de force et de virilité. C’est pourquoi le vin est qualifié aussi de viril et défini comme un vin “puissant, vigoureux, plein de force et de caractère”.


3.2. MARQUES DE FÉMINITÉ = CARACTÉRISTIQUES VISUELLES ET
GUSTATIVES

Même si les attributs physiques caractérisant le vin concernent l’homme par le sème /+force/, la personnification féminine est très fréquente en œnologie. Et cela surtout dans le vocabulaire des "profanes" de la dégustation, car ils valorisent la symbolique sensualiste du vin. La complicité qui naît entre le buveur et le vin renvoie, à travers son enracinement terminologique, à une relation amoureuse. Le vin est féminin, il a une robe, du corsage, de la cuisse, de la rondeur ou même de l’amour.

Un vin féminin est souple. Le moelleux (la sucrosité) l’emporte donc sur les tanins
(l’astringence). Si la féminité s’associe à la douceur dans son sens figuré, l’œnologie reprend ce symbolisme jouant sur le sens propre de doux.

Contrairement à la créativité métonymique de bouche et de nez, on définit l’ensemble des caractéristiques visuels (couleur, limpidité, texture apparente) non par l’oeil, mais par la robe du vin. Ce terme engendre dans le jargon des oenologues une constellation sémantique de couleurs et de tissus : “somptueuse robe pourpre de taffetas”, “profonde robe de satin jaune”
. La connotation féminine est évidente, même si le terme s’est spécialisé aussi pour
les vêtements des ecclésiastiques et des juges. Puisque le vêtement recouvre le corps et lui confère une apparence, la robe a été investie en raison de son étymologie avec le sens de "pelage" (ex. robe du cheval, du chien). Les syntagmes des dégustateurs prouvent que la métaphore robe du vin n’est pas issue de cette filière figurative (du corps du vin), mais du sens spécialisé de "vêtement de femme". La partie supérieure de la robe – le corsage – apparaît aussi en œnologie dans le syntagme vin qui a du corsage, comme synonyme de délicat, féminin, fin.

Autrefois, on disait d’un vin charnu qu’il a de la cuisse; d’un vin souple, moelleux qu’il a de la rondeur. L’allusion au corps féminin est fort évidente. A partir de 1950, quand on a reconnu le diplôme d’oenologue, les exigences de la technicisation du vocabulaire de l’œnologie ont engendré la suppression des termes à connotation féminine ou sexuelle comme corsage, cuisse, rondeur ou jambes. La robe résiste, de même que l’amour. Ce dernier est un terme bourguignon pour caractériser un vin qui est bouqueté, souple et velouté.De Bourgogne sont issus d’ailleurs les premiers crus aux noms évocateurs : Les Amoureuses,Le Clos de la pucelle.


3.3. LES PARTIES DU CORPS = CARACTÉRISTIQUES VISUELLES,
OLFACTIVES ET GUSTATIVES DU VIN


La première étape de la dégustation est celle visuelle. Les jambes désignent les traces laissées par le vin sur les parois du verre lorsqu’on l’agite ou l’incline. Selon une idée très répandue, elles marquent la présence de la glycérine. Cet emploi métaphorique est dû à une analogie de forme (traces qui s’écoulent - jambes), qu’on pourrait traduire par le sème /+verticalité/. Dans les glossaires d’œnologie, les jambes apparaissent comme synonyme de larmes du vin, terme plus fréquent. Les gouttes fines adhérant au paroi indiquent que le vin pleure, phénomène rencontré spécialement chez les vieux vins. Si le vin pleure exagérément, cela signifie qu’il est trop gras.

En ce qui est des caractéristiques olfactives, elles sont encodées dans le terme nez du vin. Le nez, organe sensoriel de l’olfaction, est souvent assimilé – dans le français général – à la fonction de l’odorat (ex. avoir un bon nez). D’ailleurs nez est issu du sanscrit nasa, "parfum".
Par extension, il est utilisé pour “l’ensemble des caractéristiques olfactives d’un produit odorant : le nez du vin ”. Un terme presque synonyme de nez est bouquet, qui s’emploi pour les vins plus vieux ayant transformé les arômes en parfums plus complets. La bouche désigne, toujours par métonymie, l’ensemble des caractéristiques olfactives perçues dans la bouche.

4.Conclusions

L’étude de cette terminologie de spécialité nous a permis de lui déceler la systématicité. Ses métaphores lexicalisées (catachrèses) sont organisées en riches séries synonymiques (ex. robuste-fort-puissant-solide-vigoureux) ou bien en couples antonymiques (ex. maigre/gras).
Les relations sémantiques que les mots entretiennent dans le langage de l’œnologie ne correspondent pas intégralement à celles du français général (ex. gras devient synonyme de souple).

Une autre observation est liée à la systématicité du concept métaphorique de corps. Celui-ci s’organise dans un système cohérent de sous-domaines: texture (charpente, chair), attributs physiques, parties du corps, marques de sexualité.
Il conviendrait donc de ranger toutes les expressions métaphoriques sous le pouvoir génératif de la métaphore conceptuelle LE VIN EST UNE PERSONNE. L’omniprésence des métaphores anthropologiques est signalée par Vico dans sa Scienza Nuova de 1725:

“Dans toutes les langues, la plus grande partie des expressions par lesquelles on
désigne les choses inanimées sont empruntées aux dénominations du corps
humain: ainsi chef ou tête se dit d’une sommité ou d’un commencement; en face
et au dos se dit pour devant et derrière; (...) on dit les yeux de la vigne (...).

Chaque langue pourrait nous offrir une infinité de ces exemples, et cela démontre
d’autant plus la vérité de cet aphorisme: que l’homme ignorant fait de lui-même la
règle de l’univers. Et en effet, dans les expressions que nous venons de rapporter,
l’homme a fait de son être un monde entier”.
Cette observation, parfaitement cohérente avec les conclusions dégagées de l’étude de la terminologie œnologique, nous permet d’aller en amont des propos de Lakoff et Johnson.
L’expérience sensorielle n’est plus l’outil qui rend accessible un domaine conceptuel plus abstrait, mais l’objet même de la compréhension. La métaphorisation conceptuelle en œnologie est sous-tendue non pas par l’approche sensorielle du monde, mais par l’acteur de cette expérience, le corps humain dans ses différents aspects physiques.

Sources :
metaphorik.de Amoraritei, La Métaphore en OEnologie
Boyd, R. : “ Metaphor and theory change. What is metaphor a metaphor for?”
Peynaud, E./ Blouin, J : Le goût du vin. Le grand livre de la dégustation,
Le Guern, M.: Sémantique de la métaphore et de la métonymie
,

technique marcottage

Franc de pied
car reproduit selon la technique ancestrale du marcottage abandonnée pour cause de phylloxéra. Le marcottage ou provignage consiste à enterrer une branche et à en faire ressortir la terminaison. La partie souterraine se dotera de racines. il suffira ensuite de couper la branche de sa "mère" et vous obtenez ainsi un nouveau pied de vigne prêt à être planté.


















Source :

http://www.vins-etonnants.com/ca_54__Franc-de-pied.htm, http://www.bollinger.fr/, http://www.bld.fr/

A Gouter :

1 fois avant de mourir "Bollinger Vieilles vignes Françaises" (plusieurs centaines d'euros la bouteille !!!

Plusieurs fois tout au long de sa vie avec un super RQPP (Rapport Qualité Prix Plaisir) :

Image de Provignage 2006

Bourboulenc 2007 , Chenin Vinifera 2006 , Coup Franc 2004, Gamay Vinifera 2006 , Lehengoa 2004 , Merlot 2006, Provignage 2006, Sauvignon Vinifera 2006, Terres Salées 2003 rouge, Terres Salées 2006 Blanc,

La Biodynamie par Nicolas Joly


LA BIODYNAMIE

L'ENJEU URGENT DE LA BIODYNAMIE
par Nicolas Joly


Lorsqu'on parle d'Appellation Contrôlée il faut comprendre qu'un sol n'est que le dernier maillon, ou le relais, d'un monde plus subtil, moins tangible, qui est situé au-dessus du sol!

Quel est ce monde subtil ?

Il correspond à tout ce qui est autour de nous, c'est-à-dire d'abord l'atmosphère, faite d'air, de lumière, de chaleur. Car la terre ne s'arrête pas sous nos pieds! Elle se prolonge à quelques centaines de kilomètres au-dessus de nos têtes jusqu'à une ceinture de chaleur riche en hydrogène que l'on nomme héliosphère.
Et ce monde "supérieur" de la Terre est lui-même le relais d'une organisation encore plus fine et noble dont le soleil est l'acteur dominant.

Pendant ces millénaires l'agriculteur a vénéré le soleil dont il sentait les forces se prolonger dans le sol. La science, actuellement (travaux de C. Bourguignon), découvre dans le sol une extraordinaire organisation vivante (un milliard d'organismes vivants au gramme !) magnifiquement combinée non seulement suivant la nature géologique du sol, mais surtout suivant les caractéristiques du micro climat, au sens large, qui conditionne ce sol

Bien comprendre cela, c'est redécouvrir le sens profond des appellations contrôlées. En d'autres termes, suivant des critères aussi variés que les vents dominants, les écarts de température, la longueur des saisons, l'orientation des pentes, la végétation environnante, etc... le nom des micro-organismes diffère!!! Quand on sait que les racines d'une vigne ne peuvent se lier au sol que par ces micro organismes, on comprend comment "fonctionnaient" les A.O.C. !
Notre agriculture dite de "progrès" a anéanti l'organisme sol (désherbants) qui de ce fait, ne peut presque plus générer de croissance et est devenu pour cela dépendant des engrais chimiques que la vigne doit absorber lorsqu'elle boit. Mais cette source de croissance est totalement étrangère aux A.O.C. et la même du Chili à l'Europe. Autrefois, on nourrissait le sol, aujourd'hui, on nourrit la vigne!
Ceci explique l'immense uniformité, encore grandissante, des vins proposés au public. La vendange, plus marquée par le cépage que par le sol et son climat, a infiniment besoin d'être personnalisée en cave ! C'est le reniement partiel des A.O.C. par l'utilisation grandissante de la technologie et des levures aux arômes dominants... C'est aussi le changement du vieillissement du vin, de leur potentiel a bien vieillir.
L'originalité de la biodynamie, long sujet difficile à résumer, est non seulement de renforcer la vie du sol dans sa typicité toujours différente, en l'imprégnant de matière animale et végétale (compost), mais aussi par l'utilisation de différents préparats, d'aider le végétal à se nourrir et se surnourrir de lumière et de chaleur. D'améliorer sa photosynthèse.
Lorsqu'on regarde une fleur, on comprend que sa noblesse (couleur, odeur, arôme, forme) vient du monde solaire. C'est cette même force, qui se manifeste chaque fois différemment, qu'il faut intensifier dans un vin ou dans un aliment. C'est elle qui est la véritable origine de la qualité.
Lorsque la Terre est trop livrée à elle-même, lorsqu'elle se coupe un peu de sa source solaire vitale, la sève redescend, les feuilles tombent, la gravité prend le dessus sur la lévité.

Cela s'appelle l'hiver !

L'agriculture dite de "progrès" créée un hiver permanent en faussant la relation de la plante et du soleil, et la nouvelle génération de produits de traitements qui vont dans la sève, d'où leur nom "systémique" et dans le fruit accentue ce déséquilibre. Il faut aller dans l'autre sens. Arrêtons d'isoler la vigne en détruisant les sols qui ne sont alors plus des matrices qui accueillent le monde solaire (La Terre Mère disaient les anciens). Arrêtons aussi d'isoler la vigne par le clonage ou la génétique, en cassant sa capacité à se lier à un monde invisible, subtil, qu'elle doit densifier toujours différemment en arôme dans son fruit.
Prenons conscience de ces innombrables pollutions hertziennes, immenses agitations invisibles dans l'atmosphère qui forment une barrière entre le monde solaire et la terre, entre la lumière et la vigne. Dans la vie chaque organe vivant a une "fréquence"; les asiatiques disaient "vibration". Toute vie est animée d'un ou de multiples rythmes. Les nouvelles longueurs d'ondes que l'on a installées dans notre vie sont loin d'être neutres : téléphone portable : 900 millions de vibrations/seconde, électricité 50/60 vibrations/seconde, micro-onde etc. Elles gênent ou faussent les fréquences qui génèrent la vie. Comme pour les désherbants produits miracles d'il y a 20 ans, il faudra plusieurs décennies pour le faire admettre.
Dans ce monde désordonné, il faut aider la vigne à se lier à son entourage terrestre (vivifier les sols), et solaire (aider la photosynthèse).


La biodynamie sait le faire !

Par exemple des traitements à base de poudre de quartz pourront renforcer une lumière déficiente ou dénaturée. Un traitement de valériane (haute concentration en phosphore) pourrait intensifier une chaleur peut-être absente. Une tisane d'ortie pourrait ramener une circulation arrêtée par la sécheresse. D'une manière générale, tous ces préparats compliqués que l'on peut résumer en quelques lignes sont mélangés au compost. Suivant la situation géographique d'un vignoble, suivant les caractéristiques de l'année, chacun pourra agir différemment en intensifiant les forces d'en bas (vie du sol) ou les forces d'en haut (lumière, chaleur).

Le viticulteur de la champagne n'est pas celui du midi. C'est dans cette polarité que l'agriculteur reprendra le rôle qu'il aurait dû toujours jouer.

C'est dans ce même contexte que l'on retrouvera par exemple le rôle d'un paysage, (travail de l'INRA : Vigne et Terroir) antidote à cette dévastatrice monoculture. Suivant la nature des arbres environnants, de leurs différentes affinités (l'érable et la lumière, le cyprès et la chaleur, le saule et l'eau etc ... ), on va influer sur l'ambiance, sur l'aura d'un vignoble. La vigne s'en nourrira par ses racines un peu, (micro-organismes différents), et par ses feuilles surtout. Le vin, se personnalisera encore plus. Il faut comprendre cette habileté de chaque végétal, de chaque fleur aussi, à se lier, à densifier au printemps des substances si diluées dans l'atmosphère; des substances qui deviendront d'innombrables parfums, toujours si différents. Peut-on être dégustateur sans être sensible à ces mystérieuses facultés ?
Pourquoi ne pas essayer de les comprendre, d'aller dans leur sens au lieu de tout détruire? Pourquoi ne pas se servir de la nature pour aider la nature. Cela devient urgent .


Claude BERNARD disait "le virus n'est rien, le terrain est tout". Cette phrase "clef' doit nous aider à comprendre les nouvelles maladies que l'on a générées sans le savoir et qui deviennent si virulentes et pour lesquelles aucune solution n'a été trouvée depuis plusieurs années. Il faut comprendre ces nouvelles maladies contre lesquelles on s' acharne si mal, si dangereusement. Les agents destructeurs que sont certains virus n'ont de pouvoir que si les forces de santé sont déficientes. Faire une planète stérile n'a pas de sens.
Il faut vivifier les sols, recréer des ceps (des portes greffes), exempt de manipulations génétiques ou clonales, pleins de forces nouvelles. Il faut nourrir les lieux de vie, de paysage, de diversité, de l'extraordinaire puissance de la biodynamie aussi. Seul cela peut permettre d'arrêter cette terrible fuite en avant si destructrice qui, à coups d'arrêtés ministériels (avril 94), impose de force des traitements insecticides ( pervers pour l'homme aussi ), par hélicoptère : 500 hectares en 94 ; 6500 en 95 !!!
On anéanti ainsi systématiquement l'alternative vivante agrobiologique trop embarrassante et on asservi encore plus le viticulteur, l'agriculteur à sa perte et à un monde si lucratif pour l'industrie phytosanitaire!Jamais on a été aussi près de maladies aussi graves que le phylloxéra !. Jamais les germes de ces nouvelles maladies qui existent depuis des millénaires n'ont été aussi actifs devant une vigne moribonde privée de ses forces solaires de défense.

Loin de soigner, loin de guérir, on achèvera de détruire la vie déjà si faible par des insecticides etc. pour faire de la génétique (ils sont presque prêts !) et qui ne pourront plus "faire" de maladies, même cette faculté indicatrice de l'erreur sera enlevée ! Et ceci sera présenté comme un progrès ! Le monde solaire leur sera inaccessible. La technologie et les artifices feront entièrement leur goût. L'usine aura remplacé la vie ! Le nouveau marché sera énorme.
N'est-il pas temps de réagir, de s'unir, viticulteurs, agriculteurs, restaurateurs, sommeliers, consommateurs, pour que l'on arrête de bafouer chaque jour un peu plus les lois de la vie au nom des seuls intérêts économiques ?


Note :La biodynamie donnée par R.STEINER 1924 est reconnue officiellement depuis 1987 par le gouvernement. Sa marque "DEMETER" est protégée mondialement. Cette marque n'est donnée qu'après 3 ans pleins de biodynamie sur l'intégralité du vignoble. Il faut souvent 7 ans pour un plein effet de la biodynamie. 1500 hectares de vigne (des milliers en agriculture) sont en biodynamie ou en reconversion. 15 viticulteurs ont le label Demeter.6 d'entre eux vous présentent leur vin.

LA CHARTE DE QUALITÉ

Préambule:

Le système de cotation ci-dessous ne parle pas de bio ou de non bio mais donne simplement les actes qui permettent à une appellation de s'exprimer .
On peut donc passer de 1 (*) à 3 étoiles (***) "vertes " et à ceci vient s'adjoindre la notation habituelle que font les guides des vins.
Ce système incite le viticulteur a mieux agir et informe le client des incidences des gestes agricoles ou de cave sur l'expression des appellations.


* Obtention d'une étoile *

Un vin d'AOC a un goût particulier lié à l'expression du terroir, d'un sol et d'un climat. L'agriculture doit donc renforcer la vie organique du sol et éviter tout produit chimique de synthèse.

> Aucun désherbant qui détruit la vie des sols.
> Aucun engrais chimique qui créé une croissance atypique. Ces engrais sont des sels. La plante doit boire plus, donc croître pour compenser la salinité qu'on lui impose.
> Aucun produit chimique de synthèse qui peut fausser la photosynthèse et donc le goût du vin.
> Aucun traitement systémique donc absorbé par la sève dans la demi-heure qui, outre un effet négatif sur le métabolisme de la plante, sur la photosynthèse et sur les champignons des racines (mycorhize), peut se retrouver sous forme de résidus dans le raisin.
> Aucune levure aromatique, puisqu'elle éloigne le vin du profil de goût et de son AOC.


* * Obtention de deux étoiles **

Dans les dernières années, la formidable poussée de la technologie a permis de recréer des goûts qu'une agriculture déficiente avait faussés. Un retour à de bonnes pratiques rend cette technologie inutile et laisse à chaque vin son goût d'origine sans tromper le consommateur.

> Pas de vendange mécanique, afin d'obtenir une maturité optimale.
> Pas d'ajout de levures exogènes donc étrangères au lieu et au profil climatique de l'année.
> Interdiction d'enzymer les moûts. Une agriculture saine donne une couleur abondante.
> Pas de concentrateur par osmose inverse. Ce processus peut aboutir à des déséquilibres, notamment sur le vieillissement.
> Pas de cryoextraction qui fausse l'équilibre du vin.
> Pas de passage au froid jusqu'au point de solidification.


*** Obtention de trois étoiles ***

> Pas de déacidification ni de réacidification qui changent l' équilibre des vins.
> Pas d'adjonction d'acide ascorbique, ni de sorbate de potassium.
> Pas de chaptalisation y compris par moûts concentrés.


Tous les vignerons qui ont adopté cette charte auront des vins authentiques et donc inimitables, car le rapport sol/climat a un "visage" partout différent sur la terre.
Le viticulteur signant cette charte, sous contrôle d'huissier de justice, s'engage à respecter cette déontologie pour l'intégralité de sa production. Il est informé qu'il peut être contrôlé à tout moment par un membre du groupement.


Des levures génétiques dans le vin ?

L' agriculture conventionnelle détruisant la grande majorité des levures présentes naturellement sous des formes très diverses dans les vignes, le relevurage est devenu hélas une pratique presque incontournable pour beaucoup.
Il faut savoir que légalement plus de 300 levures aromatiques peuvent parfumer les vins d'AOC et dans trop de cas les éloignent de leur typicité d'origine.
La question est donc de se demander comment obtient-on toutes ces levures ? A t'on recours à la transgenèse ? Quelles peuvent être les conséquences sur le vin dans son vieillissement par exemple et pour l'homme qui le boit?
Sur un plan légal il faut distinguer le terme "auto clonage" du terme "transgenèse".
Il semble que le plus souvent on utilise l'auto clonage pour fabriquer ces levures. Dans l'auto clonage par le génie génétique on retire les gènes d'une séquence génétique pour réintroduire ou non une partie de ceux-ci ou un "équivalent synthétique".
Ceci peut se faire "avec des cellules de la même espèce ou dans des cellules d' espèces étroitement liées..."

Ceci appelle 3 réflexions :

1) Quand on retire des gènes d'une séquence génétique pour n'en réintroduire qu'une partie, ne modifie t'on pas un équilibre ? Au fond qu'advient-il d'une partition dont on retire les notes de musique ? Chaque gène à une fonction et le professeur Seralini dans ses conférences ne manque pas de souligner qu'en introduisant dans une séquence génétique (OGM) un gène étranger on peut modifier le rôle des autres gènes. Ceci est facile à comprendre, la vie n'est pas une mécanique. Une personne qui vient se joindre à la discussion d'un groupe de 3 autres personnes ne va pas modifier que 25% de la discussion. Si c'est une forte personnalité c'est toute la discussion qui va changer !
N'a t'on pas le même risque en auto clonage puisque l'organisation globale de la séquence est modifiée ?

2) Un "équivalent" synthétique est-il vraiment identique à l' organisme copié sur le plan des lois de la vie ? En d'autre termes quelque chose qui est fait par une matrice naturelle solaire marquée par les saisons et les rythmes etc... est-elle comparable sur le plan de ses qualités à un produit refait en
laboratoire ? Si vous comparez la vitamine C du cynorhodon (fruit de l'églantier) à une vitamine C synthétique vous pourrez juger vous même sur votre santé des différents effets. La vie n'est-elle pas faite de fréquences, de rayonnements, les asiatiques diraient de vibrations ? Sur ce plan, le
synthétique est-il identique à l'organisme vivant ? On ne voit pas comment on pourrait dire oui.
D'autant qu'une des méthodes classiquement utilisée pour fabriquer une levure aromatique consiste à placer en amont du gène qui donne un goût, un agent "promoteur" qui renforce cette fonction. On retrouve là cette notion de "toujours plus" qui transforme un acte ponctuel de la nature épisodique
en une fonction d'usine.

3) Qu'entend-on par cellule de la même espèce ou "étroitement liée" ? N'ouvre t'on pas discrètement la porte avec cette notion de "famille" a la fabrication d'OGM qui pourraient ne pas porter leur nom du fait d'impératifs commerciaux ?
A ceci il faut ajouter qu'aujourd'hui on ne connaît peut-être que 20% de tous les microorganismes de notre monde et qu'il est donc quasiment impossible de mesurer les effets possibles perturbateurs des levures auto clonées sur leur entourage. Ceci du reste intéresse peu de gens même si c'est un risque pour les levures naturelles qui font partie de notre patrimoine de typicité d'AOC.
Ce que l'on appelle donc "transferts horizontaux" est difficilement contrôlable en dehors des laboratoires...
Et qu'en est -il du vin qui utilise ces levures?
Ce que l'on sait c'est que ces levures ainsi faites sont moins durables et que remises dans un contexte vivant, elles ont après un peu de temps tendance à disparaître. En d' autres termes il semble que le contexte de vie les rejètent. Est-ce pour cela que de plus en plus de vins semblent avoir perdu une partie de leur capacité à vieillir ?
Si l'on admet que la vie est un tout, un peu comme une fresque dont chaque partie ou "micropartie" s'incarne pour aboutir à l'immense diversité des espèces on peut comprendre qu'il y a partout autour de nous une organisation, des échanges, des harmonies, que l'on ne peut déplacer à l'aveuglette sans conséquences.
C'est d'ailleurs le thème du livre de Perez, chercheur scientifique, "La Plan(e)te transgénique" qui retrouve des proportions sacrées (nombre d'or) dans les séquences génétiques.
Enfin on se doit de rappeler qu'en biodynamie on se sert de ce monde énergétique constructeur de vie pour aboutir à un vin très personnalisé sans aucun artifice dont les fermentations démarrent dans les quelques heures et uniquement bien sûr avec les levures indigènes, ce qui accentue l'expression de l'AOC. N'est-ce pas plus simple ?

La renaissance des vins d'appellations

Dans les années 30 on a créé d'une manière géniale et inimitée le concept des appellations :dans un lieu précis, un cépage précis donnait un goût si particulier à son raisin que l'on allait en garantir légalement l'originalité pour les consommateurs.
70 ans après que reste-t-il sur le fond de cette protection ? Hélas souvent peu de choses. Pourtant une prise de conscience chaque jour plus rapide semble être en voie de restaurer aux AOC leurs sens profonds.
Comprenons d'abord ce qui s'est passé.
Comment ces AOC ont elles pu perdre, au moins en partie, leur lustre ?
Dans les années 60/70 les conseillers agricoles commencent à sillonner les vignobles avec frénésie pour recommander l'usage des désherbants. C'est un gain de temps énorme pour le viticulteur de ne plus devoir travailler ses sols. On prend bien soin de ne pas lui dire qu'en même temps il détruit la vie microbienne et bactérienne de sa terre. Donc qu'il détruit la possibilité pour ses vignes de s'alimenter puisque aucune racine ne peut par elle même s'alimenter d'aucun terroir si elle n'est pas pour cela assistée de micro-organismes.

Le piège est bien tendu et effectivement 5 à 10 ans après chacun constate que la croissance est moindre. Les engrais chimiques viennent alors massivement se substituer à la croissance naturelle déficiente. Que sont ces engrais chimiques ? Des sels qui forcent la vigne à boire plus d'eau pour compenser la salinité qu'on lui impose. Chaque ménagère à vu fondre dans ses casseroles les gros légumes qui restituent l'excès d'eau qu'ils ont du absorber etc... C'est le même régime de croissance que l'on conseille pour la vigne !
Il en résulte peu après d'une part une tendance accrue à la maladie et d'autre part une typicité parfois choquante du goût de la vendange. Pour mieux répondre aux maladies que l'on ne veut délibérément pas comprendre on invente les "systémiques" une technique qui fait passer le produit de traitement dans la sève alors qu' auparavant ils restaient à la surface de la feuille sans interférer avec l'organisme interne de la plante. Cette réponse très efficace va secrètement d'abord générer de nouvelles maladies qui représentent maintenant un problème de plus en plus grand. Et en sus elle accroît le nombre de résidus de chimie de synthèse dans le vin.
Pour ce qui est de la typicité du goût on invente progressivement une incroyable technologie qui transforme parfois les celliers en usine. Plus de 300 levures aromatiques sont mises au service des viticulteurs offrant ainsi aux vins une gamme immense de panoplie aromatique s' étendant de la framboise à la banane en passant par le cassis. Ces goûts bien que légaux sont bien sûr totalement mensongers par rapport au profil de goût que le lieu savait développer mais qui s'en soucie? On créé aussi des enzymes qui arrache les couleurs que les pulpes donnaient avant avec harmonie, des gras qui font croire à un soleil abondant etc...
Les précieux conseillers qui vivent de cet assistanat, secrètement généré au dépend des AOC, ne jurent alors que par les progrès de l'oenologie. Apporter un autre discours agricole dans ce contexte en soulignant ce que sont les lois de la vie sur Terre, est un acte risqué; les téméraires qui s'y sont essayés peuvent en témoigner.
Mais la nature sait reprendre ses droits quand on s'entête à ne pas l'écouter. Récemment un des grands journalistes du vin en France écrit: "quels regards porteront les crédules étrangers sur ces vins achetés à 80 Euros, croyant faire un placement ou s'offrir un vin de garde quand ils vont s'apercevoir qu'ils se sont fait gruger... la gonflette artificielle, l'extraction lourde ne pèse pas grand chose à l'épreuve du temps". En d'autres termes le cosmétique ne vieillit pas bien dans un vin et le temps est en train de différencier le bien du faux. On est en train d'apprendre que le goût du vin, son harmonie, sa beauté, son élégance appartient à un monde qualitatif d'origine intangible qui ne peut se rajouter comme on remet une couche de peinture. La qualité naît d'un tout organisé et intangible qui se prolonge dans les raisins que par le respect d'un certain nombre de lois qui génèrent la vie sur Terre. Et ces lois macrocosmiques, l'homme d'aujourd'hui est bien incapable de les appréhender puisqu'il ne s'intéresse qu'à ce qu'il a au bout de son microscope ou de son ordinateur.
La vigne finalement comme toute plante ne fait que transformer de la non matière en matière.
C'est cela la photosynthèse, convertir de l'air, de la chaleur, de la lumière en bois en feuille en fruit et aussi en goût, en couleur en odeur. C'est de l'énergie qui devient matière et tout ce qui est vivant est fait de fréquences qui s'harmonisent entre elles -c'est comme une note de musique- que l'on ne peut appréhender par son poids, et qui s'intègre dans une partition globale. Chaque fruit est un réceptacle à un monde harmonieux d'où vient la vie.
Le vrai viticulteur, celui qui s'attache à cette compréhension de la vie veille à ce que chacun de ses gestes agricoles n'affectent pas ce vaste système créateur. C'est cela la biologie laisser la nature "oeuvrer". La biodynamie elle va plus loin. Elle profite d'une connaissance de ce système vivant, énergétique pour aider la plante, la vigne à mieux se nourrir. Elle les catalyse en agissant sur la photosynthèse ou sur la vie du sol donc sur les racines. Et comme l'énergie ne se mesure pas en grammes -qui se soucie du poids d'ondes quand on utilise un portable !- ce résultat peut s'obtenir avec des quantités de préparats à l'hectare infinitésimale, quelques grammes ou quelques centaines de grammes. C'est ce qui choque tant nos conseillers matérialistes qui n'ont toujours pas compris que la vie en tant que fréquence ne se mesure pas quantitativement. Et il y a aussi le fait que la biodynamie vient faire fondre le marché si lucratif de l'assistanat pour redonner à l'homme de la terre un savoir qu'il n'aurait jamais du perdre.
Ce revirement fait par plus en plus de grands viticulteurs vers la biodynamie vient des résultats obtenus surtout. Et aussi du fait que le consommateur est en train de réaliser que les goûts technologiques sont reproductibles partout sur la planète. En d'autres termes qu'on peut trouver le même goût à 5 voir 10 fois moins cher. Pour une fois les lois de l'économie -vont dans le sens de la vérité.
La France est un des pays au monde avec le plus de microclimats et de vrais terroirs à vigne. Il suffit de redonner le savoir, le vrai savoir pour bien les faire revivre.
Prenons dans ce guide plaisir à retrouver dans un vin, un lieu plus ou moins grand et des gestes plus ou moins justes mais qui manifesteront toujours un désir de vérité. Et garantissons cette démarche par une charte de qualité véritable.


ON A EMPOISONNE LA NATURE

La Revue du Vin de France ( Février 2002 )
Entretien recueilli par Olivier Poels

La RvF : Nous débutons cet interview avec une Coulée de Serrant 1996. Pourquoi ce vin ?

Nicolas Joly : C'est un vin accompli qui montre déjà de quoi il est capable. Il synthétise assez bien l'idée que je me fais de la Coulée de Serrant. Quiconque le goûte y découvre sa minéralité, son originalité et son ampleur. Je le trouve plutôt réussi.

La RvF : Quelle est l'idée que vous vous faites de la Coulée de Serrant ?

N.J. : La Coulée de Serrant est avant tout un lieu particulier qui a plus de 1000 ans d'histoire avec la vigne. A mon sens, tout ce qui est vivant doit s'exprimer dans un vin. Ici, nous trouvons donc le reflet de ce terroir des bords de Loire, mais aussi un caractère original évoquant l'action des vents, qui contribuent eux aussi au terroir. Chaque geste que nous exécutons vise à transmettre dans le raisin, et par conséquent dans la bouteille, l'identité de ce site unique.

La RvF : Comment faire pour retranscrire l'expression de ce terroir ?

N.J. : Il faut se garder de deux tentations: celle qui consiste à vouloir " sur-exprimer" les originalités d'un terroir tout comme les initiatives qui peuvent l'atrophier. En effet, la beauté, l'élégance, la finesse ne se mesurent pas en grammes. De la même façon les ondes et les fréquences qui nous entourent et auxquelles je m'interesse beaucoup ( par exemple les ondes artificiellement diffusées par les lignes électriques à haute tension, mais aussi les ondes émises naturellement par les organismes, les minéraux ou les astres ), tout cela est difficilement quantifiable. or ces ondes existent et ont même une influence déterminante sur la vie; La biodynamie, encore mal comprise, utilise ces fréquences de vie, et non plus les matières vivantes, pour permettre aux plantes de tirer le meilleur de leur terroir.

La RvF : Energie, ondes, fréquences...N'avez-vous pas peur de passer pour un illuminé ?

N.J. : Non........oui. On est parfois considérés comme des ringards, mais les accusations du genre " ça ne marche pas, vote truc " sont maintenant dépassées. Il y a suffisament de gens sérieux qui se sont penchés sur le sujet et qui ont démontré le contraire. Prenez mes vins : leur capacité à vieillir, à résister à l'oxydation, leur originalité de goût, ce sont vraiment des choses exacerbées grâce à la biodynamie. Je l'affirme: la survie de la viticulture française passe par là. Elle a une chance énorme, elle est pleine de microclimats, de terroirs, mais ils ont été amoindris par les désherbants, les engrais chimiques.
En contre partie, on a introduit de la technologie, c'est-à-dire que l'on a voulu recréer en cave le goût perdu à la vigne. Mais le consommateur va se rendre compte qu'il s'est trompé. Il faut donc, si l'on veut vraiment sauver la viticulture française, exprimer les magnifiques beautés et spécificités de la France pour permettre de nous différencier de cette course au "bon industriel".

La RvF : Est-ce en passant tout le vignoble français en biodynamie que l'on va régler la crise ?

N.J. : L'authenticité passe par le respect des lois de la vie, et ce respect peut passer par une culture biologique classique qui consisterait à laisser faire la nature. Le problème, c'est que depuis plusieurs décennies, on a empoisonné la Nature. Alors, la laisser guérir seule va prendre pas mal de temps. La biodynamie est un énorme raccourci puiqu'elle permet par les lois de l'énergie de recréer une vie intensive du sol à un mètre de profondeur. Cela dit, passer tout un vignoble en biodynamie n'est pas possible: le plus grand danger de ce système serait d'aboutir à une biodynamie mécaniste, avec un conseiller lambda qui prescrirait tel ou tel traitement à effectuer à telle date et décernerait un label. Ce n'est pas souhaitable. J'essaie d'agir à l'inverse en incitant les gens à devenir autonomes, à s'imprégner de leur lieu afin qu'ils l'expriment au mieux dans leurs bouteilles.

La RvF : La biodynamie ne souffre-t-elle pas d'un problème d'image ?

N.j. : Il faut refaire notre communication , c'est évident. Les partisans de la biodynamie sont restés trop isolés. Nous avons aussi souffert d'un côté "vieux soixante-huitard attardé" où l'on se bornait à défendre une philosophie sans se poser de questions, quitte à produire des vins médiocres. L'explication est primordiale et doit être relayée par le monde scientifique afin de prouver sa crédibilité. C'est-à-dire, expliquer l'influence des lois macro-cosmiques sur la terre, mais montrer en parallèle que les mois de la terre ont aussi un rôle à jouer. Il faut "réenseigner" un savoir ancestral oublié par les ingénieurs agricoles. Aujourd'hui il n'y a plus de savoir agricole, mais une espèce de discours marketing imposé par l'industrie phytosanitaire qui forme les professeurs. Un des jeux de nos détracteurs consiste à dire que ces pratiques sont des superstitions. Mais on est en train de découvrir qu'il existe des synergies qui permettent de se dégager de l'emprise trop puissante de l'industrie phytosanitaire, ruineuse pour les viticulteurs et désastreuse pour le vignoble.

La RvF : En sorte , vous êtes un peu le "José Bové" du vin ?

N.J. : Oui, nous partageons un état d'âme et un grand désir de ramener un humanisme. Moi je voudrais que les gens retrouvent leur liberté, leur créativité, c'est la meilleure parade aux excès des ultras du mécanisme.Je renvoie à une phrade de de Gaulle, que j'aime beaucoup :"On est entouré de deux sortes de personnes : ceux qui savent tout et qui ne comprennet rien et ceux qui ne savent rien et comprennent tout". A force de remplir la tête des pauvres gens d'un faux savoir, on fabrique des intellos dangereux. Il faut arrêter le "scientifisme" à outrance sur les vins pour montrer que le bon sens, la finesse de perception, la vie des leiux comptent tout autant.

La RvF : Comprenez-vous que l'on soit méfiant vis-à-vis de vos théorie ?

N.J. : Si des gens ne veulent pas voir cet aspect des choses, c'est leur droit, on est en démocratie. Cela dit, les vins parlent d'eux-même et de nombreux vignobles produisant parmi les plus grands vins de France ont fait lechoix de la biodynamie ( Leroy, Leflaive, La Romanée Conti, Deiss, Zind-Humbrecht... ) Nous sommes de plus en plus nombreux. Pour pratiquer la biodynamie, ce qui est assea contraignant, il faut un investissement total et un vignoble pas trop grand parce qu'il est difficile de l'appliquer de manière industrielle. En général, nos détracteurs sont ceux qui n'ont pas la possibilité d'appliquer nos principes, qu'ils sentent pourtant incontournables. Et leur seule solution consiste à essayer de nous détruire. Tout cela n'est pas bien important, ce qu'il faut c'est assumer ses croyances, tout en gardant les peids sur terre.

La RvF : Oui, mais vos vins n'ont-ils pas davantage évolué grâce à une vinification mieux maîtrisée plutôt que du fait de la biodynamie?

N.J. : La biodynamie ne fait pas le vin ! Il est imortant de le dire. Elle est un catalyseur. Si j'ai des vignes dans la Beauce, bien que je sois en biodynamie, je ne ferai pas un bon vin. Il faut d'abord un grand lieu à vin. La Coulée de Serrant a cette qualité. Y adpter la biodynamie a un sens, afin de mettre en relief toutes les complexités de cette AOC. Ensuite que faire en cave ? En ce qui me concerne, je me fonde sur 20 ans d'expérienceet , c'est vrai, j'ai sans doute pêché en me préoccupant uniquement de ce qui se passait à l'extérieur. Ce que je constate aujourd'hui c'est que lorsque vous avez à l'extérieur une pratique qui "amplifie" la vigne, le raisin portera en lui les principes qui lui permettront de bien se comporter en cave. On peut ainsi se dispenser de pratiques désuètes comme l'utilisation de levures aromatiques.

La RvF : Comment pratiquez-vous ?

N.J. : En cave, je fais le strict minimum : débourbage léger, pas de contrôle des températures, beaucoup de bâtonnage, une utilisation très modérée des bariques neuves et pas de filtration. Il faut laisser le vin le vin être lui-même. Il est vrai que j'ai progressé au cellier, mais attention, il ne faut jamais tenter de fabriquer en cave des goûts que l'on n'obtient pas dans les vignes.Une activité de cellier trop intense est synonyme de gestes agricoles ratés.

La RvF : Buvez-vous uniquement des vins issus de la biodynamie ?

N.J. : Je ne suis pas un fasciste de la biodynamie ! Entre un vin produit par un vigneron pratiquant une biodynamie mécanique et un autre produit en biologie par un passionné d'agriculture et de vérité, je préfère le second.

La RvF : Que pensez-vous de la lutte raisonnée comme alternative entre la biodynamie et le tout-chimique ?

N.J. : La lutte raisonnée c'est du pipeau! Au lieu de mettre 100% de poison, on n'en met que 80 % ! L'industrie phytosanitaire, qui sentait que le vent commençait à souffler dans notre sens, a cherché une parade avec la lutte raisonnée, mais sans apporter aucun progrès vis-à-vis des lois de la vie.

La RvF : Comment voyez-vous l'avenir de la biodynamie ?

N.J. : Le temps joue pour nous. Il nous donnera raison. le consommateur se rendra compte qu'il y a u certainnombre de vins chers et prestigieux qui ne vieillissent pas. La gonflette artificielle ne fera pas illusion longtemps.

La Viticulture en biodynamie,

Mythe ou réalité ?

Nul doute que de plus en plus de passionnés, particuliers ou professionnels, découvrent dans un nombre grandissant de vins en biodynamie, une source de complexité, un élan, une pureté supplémentaire.

Nul doute aussi que cette agriculture, qui se différencie de l’agriculture en biologie par l’adjonction de quantités très faibles de préparats (1 à 100 gr par hectare), dynamisée dans de l’eau le plus souvent, déconcertent ceux qui tentent de la comprendre .Comment de si petites quantités peuvent avoir un effet réel sur la qualité d’un vin ? Celle ci n’aurait ‘elle pas été la même avec une simple agriculture en biologie ? Etc. etc.

Devant ces questions les camps des partisans et des opposants enflent avec régularité et l’on sent déjà poindre de part et d’autre le désir d’en « découdre » !

Pour passer de la conviction profonde qui génère les « croyances », au savoir et donc à une démonstration plus rigoureuse, il n’y a finalement ici qu’un pas à franchir. Et c’est de cette démarche que dépend en partie l’authenticité de la qualité des vins de demain.

Commençons par observer le cadavre d’un animal qui vient de mourir, en quelques semaines il va se retrouver dans la terre sous forme d’éléments très simples. La question à poser est alors : où sont les forces qui avaient construit de façon si sophistiquée cet organisme ? Celles qui avaient pris du calcium pour sculpter tous ces os, celles qui avaient pris de la silice pour former ces poils etc. Ces forces n’existent elles pas en dehors de la formation d’un embryon ?

Une graine, un œuf, ne sont ils pas seulement un réceptacle à un monde énergétique parfaitement organisé, qui dispense sur Terre des forces de vie et qui existe indépendamment de leur lien a la matière, par lequel elles deviennent visibles ? En posant ces questions on entre comme le font chaque jour un peu plus les physiciens, grâce par exemple à la résonance magnétique, dans la découverte de lois bien réelles et concrètes qui ne sont plus a proprement parlé des lois terrestres, en ce sens qu’elles ne sont pas soumises aux forces de la gravité, a ce monde de poids, et de volume, découvertes par Newton ; il s’agit donc de lois qui ne se mesurent pas de la même manière. Dans la 3eme édition de mon livre le Vin du Ciel à la Terre –disponible maintenant en 4 langues (1) - je consacre un chapitre entier à la présentation de tests, bien connus dans certains milieux, qui donnent des images de ce monde énergétique dans le vin ou dans les aliments et de la manière dont différentes agricultures peuvent les modifier. Le microscope n’a pas accès à ces réalités.


Ce qu’il faut comprendre ici c’est que le vivant n’est qu’une somme de fréquences ou de rythmes ; c’est un monde vibratoire ; Il n’y a pas de vie sans fréquences ou mini fréquences !!!

Notre société et chacun de nous utilisent journellement ce monde vibratoire par les satellites, les portables, les émetteurs, les micro ondes, les GPS etc. au point du reste que cela devient inquiétant car cette abondance de fréquences « nouvelles « perturbent celles qui nous influent la vie ! Personne n’est surpris d’entendre son correspondant , situé à plusieurs milliers de kilomètres , à l’aide d’ un portable , bien que pour cela il n’ait même pas utilisé un milligramme d’ondes ! Car une onde ne se mesure pas en poids ; mais quand on parle de l’effet, en agriculture biodynamique de quelques grammes preparats qui agissent comme des relais ou des catalyseurs de processus précis indispensables a la vie d’une plante –vie, dont on a vu qu’elle n’est pas tangible -, ceux qui n’ont pas pris conscience du monde énergétique qu’ils utilisent journellement, s’offusquent. Soyons sérieux combien de grammes de quartz font marcher votre montre pendant plus d’un an ? Alors pourquoi le preparat à base de quartz en biodynamie n’accélérait il pas la photosynthèse, celle qui génère les sucres, les couleurs, les arômes ? Pourquoi les preparats destinés au sol n’accéléraient ils pas la « mycorhize » c’est à dire le lien des racines au sol , ce qui du reste a été mis en évidence par un organisme gouvernemental Suisse qui a comparé pendant I8 ans , les 3 agricultures, conventionnelle, biologique, biodynamique ! Et à l’inverse, on peut comprendre qu’en multipliant l’utilisation de toutes ces molécules si toxiques –pour vous en persuader lisez les notices d’utilisation ! - dont on inonde les vignes et leur sol (antifongique, anti pourriture, antiacarien, pesticide, désherbant, défoliant etc.) on freine chaque fois un peu plus les liens avec ces forces qui influent la vie et la qualité.

Il en résulte, chers passionnés du vin, 3 commentaires bien importants pour la qualité des vins que vous achetez pour votre cave :

1/ L’utilisation des traitements chimiques qui on vient de le voir, réduisent la capacité des vignes a bien recevoir l’énergie solaire par leurs feuilles et la vie du sol par leurs racines va devoir inéluctablement s’accroître. Chaque traitement supplémentaire nécessaire à la domination des maladies –qui ne sont pas encore reconnues comme des indicateurs de déficience de force de santé –amènera de plus grands affaiblissements qui eux-mêmes génèreront plus de traitements. On comprend que pour les viticulteurs pris dans cette impasse la technologie sera le seul moyen d’avoir une apparence de qualité dans leurs vins et que ces dernières seront donc toujours imitables par les pays a main d’œuvre bon marché. En sus que leur capacité de vieillissement sera de plus en plus réduite


2/ L’agriculture raisonnée qui se contente de réduire l’utilisation de ces produits très toxiques de 2O% environ ne peut constituer un progrès réel sur le plan des forces de vie dont la vigne a besoin pour rester en bonne santé et pour manifester l’originalité de son appellation Ceci explique pourquoi de plus en plus de viticulteurs choisissent la biologie qui demeure le seul moyen de bien « lier » la vigne a son environnement.

3/ La biodynamie par une utilisation plus directe de ce monde énergétique franchit une étape supplémentaire très importante et accroît considérablement la possibilité pour les vignes de recevoir ces forces qualitatives qui sont à la base de ce que nous aimons dans un vin ; en sus grâce a ses liens particuliers aux forces de vie, elle peut en 2 a 3 ans annihiler les effets néfastes de désherbants etc.… la ou il faudrait plusieurs décennies d’une agriculture en biologie. La preuve en a été faite en Australie ou des terrains saturés de DTT et interdit d’agriculture par le gouvernement, ont été réadmis en cultures maraîchères après 3 ans de biodynamie. Tout ceci peut être développé longuement .Donc de plus en plus de viticulteurs sérieux vont continuer d’affluer vers la biodynamie même si directement ou indirectement on tente de les ridiculiser pour préserver des marchés économiques lucratifs .

Ajoutons seulement, que prétendre a l’inefficacité de la biodynamie fait déjà parti du monde d’hier ; mais qu’hélas celui d’aujourd’hui est tout aussi inquiétant ; le monde énergétique est un monde organisé qui peut être plus ou moins bien utilisé ; la biodynamie s’adresse à lui sans le modifier . Tout le monde n’a pas les mêmes scrupules, d’autant que dans ce domaine le contrôle est presque impossible. On voit déjà circuler sous le manteau de l’eau énergétisée qui se vend à plus de 5OOO euros le litre et qui incontestablement change le goût du vin d’une manière aussi réelle qu’artificielle. Et physiquement il n’y a aucun ajout !!! Même si ces effets trompeurs qui peuvent bluffer n’importent lequel d’entre nous … ne sont pas vraiment durables et peuvent même s’inverser il ne fait nul doute que les dérives de la technologie ont déjà commencé à toucher ce « nouveau monde énergétique ».


(1) Editions Sang de la Terre, Le vin du Ciel à la Terre

(2) Editions Acres U.S.A -Austin

(3) Editions Porthos – ITALIE – Rome



Actes Agricoles sur le vignoble de la Coulée de Serrant

Une AOC est marquée par son sol et son microclimat. Pour que la vigne saisissent parfaitement ces originalités il faut une déontologie très rigoureuse que nous avons adoptée depuis longtemps (depuis 84 tout le vignoble est en biodynamie).

- Apport de compost sur les vignes ; ce compost vient de notre troupeau de 1O vaches (Nantaises – race en disparition – et Highlands habituées aux zones inondables) et de 2 taureaux pour éviter l’insémination artificielle qui génère dans le long terme un déséquilibre.

Les vaches sont nourries à l’ancienne, avec du grain, des betteraves et du foin le tout fait essentiellement sur place. Cette nourriture marquée par le lieu, fera un compost adapté au lieu. Ce compost reçoit les préparations en biodynamie.

-Enherbement naturel ou avec le temps des dizaines d’espèces de plantes intéressantes poussent près des vignes .Ceci limite les effets négatifs de la monoculture. Chaque racine génère, en l’absence de désherbants - systématiquement interdit ici depuis 2O ans y compris sur les allées - des microorganismes différents qui permettront aux vignes de bien saisir toutes les subtilités du sol (mycorhize).


-Travail minimal du sol (chaussage et déchaussage du rang) pour ne pas mélanger les différents horizons de vie du sol. Sur la partie faite au cheval (1hectare et demi) de vignes peut être presque centenaires les sols sont entièrement laboures.

-Passage en hiver sur la plupart des parcelles d’un troupeau de moutons d’Ouessant très rustique qui se nourrit de l’enherbement et le convertit en fumure! Au printemps un poulailler portatif est installé sur les parcelles où il y a des escargots.


-Traitement des maladies par les préparations en biodynamie qui renforce le lien de la vigne à ses forces archétypales (la maladie n’est qu’une déficience de santé) et par des tisanes régulières de différentes plantes (sauge, oseille, saule, ortie, thuya, ormeau, écorce de chêne, goémon, arnica, prunellier, grande consoude etc.) Ce sont des plantes médicinales venant de la propriété pour la plupart ou des montagnes où nous les ramassons à des dates propices.


Un peu de cuivre est utilisé (bouillie bordelaise 3 a 5 kg de cuivre pur par hectare et par an) , certaines parcelles n’en ont pas depuis 3 ans. Le cuivre est un oligo-élément très utile à la vie. Le souffre est également utilisé; il est aussi très utile à la vie mais nous le remplaçons de plus en plus par le lait ou le petit lait (5 a 1O litres par hectare et par traitement) très actif contre l’oïdium et très sain pour les vignes.

-Respect de la diversité d’un paysage et à cet effet plusieurs hectares plantables en appellation restent des friches ou des prés la diversité de la vie animale et végétale qui en résulte représente indirectement une source d’équilibre pour le lieu et une richesse accrue de la vie organique des sols donc de l’expression de l’effet terroir.

- Utilisation des bois de nos plus vieilles vignes pour faire nos ceps. Le vignoble a presque mille ans d’existence et il convient de garder la typicité de nos chenins parfaitement adaptés à notre propre AOC, Coulée de Serrant. A l’inverse d’un clone il faut 6 ans avant une vendange significative !

-Taille pour un rendement limité a 2O a25 hectos / hectare en moyenne chaque année soit presque la moitié de ce qui est autorisé. Ceci permet à tous les millésimes d’être de très haut niveau et aussi d’éviter les chaptalisations (aucune sur la Coulée les 15 dernières années).

-Vendanges en 3 à 5 tris sur une période de 3 a 4 semaines pour être sûr que chaque grappe de raisin a la maturité optimale .

Tous ces points concernent nos 3 vins et nos 3 AOC.


Nicolas JOLY