lundi 24 septembre 2012

Pour se réconcilier avec Bordeaux...


Il y a quelques semaines maintenant, un internaute de passage regrettait ici l'absence de "bonnes adresses bordelaises". Pourquoi cette lacune, disait-il
en substance... Sectarisme? Putsch du mouvement anti-Merlot? Allergie aux Cabernets? Snobisme? Pas du tout, lui répondait cinglant un autre amateur. Tout simplement parce que Bordeaux serait:
"La honte de la viticulture française avec des pratiques culturales "Tchernobyl" et des prix délirants."
Bigre, me dis-je en lisant l'échange. Coté consensus on n'est pas sorti de l'auberge... Frénétiquement, je cherchais donc "la" bonne adresse. Celle qui pourrait réconcilier l'amour du vin et celui de la nature. Le goût du terroir et celui de ce Merlot dont il est vrai que certains de mes amis le voue volontiers aux gémonies.
"Un cépage tout juste bon à brûler", me disait encore récemment un caviste parisien.
On reconnaîtra dans ces propos incendiaires la volonté de revanche de terroirs sudistes sur les Châteaux bordelais. Une trop longue soumission. Trop de cépages locaux arrachés. Trop de merlots et de Cabernets plantés pour ne faire du Languedoc (par exemple...) que le grenier à raisin des Grands Crus. Dont acte. En pays cathare on appliquerait en quelque sorte la loi du talion: "Brulez-les tous... Dieu reconnaîtra le siens".

Cela n'empêche pas les mêmes de boire les Arpettes de Jean-Baptiste Senat (un Minervois 80% Merlot) ou de célébrer les vins miraculeux d'Elian Daros. Y-aurait-il donc si loin des Coteaux du Marmandais à ceux de Pauillac?
"Un monde", répondent exaspérés les adeptes de la ligne dure.
A peine 70 kilomètres, rétorque Mapy. 70 petits kilomètres pour aller découvrir ceux qui tentent de tracer leur sillon dans l'autre pays "où le vin se fait tout seul"...

Alors voilà, pour Patrick - qui la réclamait - et pour les autres, une première adresse, comme une évidence: celle de Corinne et Jean-Michel Comme. Pas parce qu'elle est bloggeuse et lui régisseur à Pontet Canet. Mais parce que chez eux aux Champs des Treilles (Sainte Foy), comme chez son employeur à lui, du coté de Pauillac, les mots, le travail, les vins, respirent l'amour passionné de la vigne. Et de la nature:
"Bien sûr, j'ai commencé comme les autres, raconte Jean-Michel. Et puis je suis passé de la conviction de "maîtriser mon métier" grâce à mes beaux diplômes et l’industrie chimique, à la certitude que tout doit s’appréhender à un niveau très fin... Bien plus fin que nous le permettent nos gros doigts. La bio-dynamie seule permet ça. Aujourd'hui, je dois réapprendre mon métier tous les jours. (...) Le chemin n’est pas simple mais quand on y arrive, les ceps respirent la sérénité…et moi aussi."
Pour l'amour du vin, Jean-Michel, Corinne et d'autres ont osé revenir à la Vérité du terroir... Contre vents et business dominants. Au Champs des Treilles, ces deux là signent des "blancs inouïs" (Frédéric Palacios dixit). Ici Sauvignon, Muscadelle et Semillon se marient avec bonheur... Et les merlots renaissent sous le regard attentif de leurs maîtres.

Voilà un endroit, en somme, où l'on peut détester Bordeaux, son arrogance présumée et ses tarifs inflationnistes, sans pour autant bouder son plaisir.

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