jeudi 27 décembre 2012

COLLIOURE

L'appellation la plus méridionale de la France continentale produit des vins de tempérament méditerranéen mais secs, contrairement à sa jumelle Banyuls. Comme souvent sous ces latitudes, les domaines situés en altitude tirent le mieux leur épingle du jeu.


Collioure partage la même aire d'appellation que Banyuls et s'étend sur les quatre communes littorales des Pyrénées-Orientales, limitrophes de la frontière espagnole. Cette coexistence ne signifie pas pour autant que les vignes produisent indifféremment l'un ou l'autre type de vin. En effet, créée en 1971 pour enfin donner une identité au rouge sec local, l'AOC Collioure a été définie sur un encépagement propre, moins axé sur le grenache, et sur une extension du vignoble à des coteaux en retrait de la mer, plus aptes à produire des vins secs.


Vins d'assemblages généralement fondés sur le grenache noir, les Collioure rouges peuvent néanmoins être issus de syrah ou de mourvèdre et comporter du carignan. La syrah et le mourvèdre ne sont pas des cépages traditionnels à la région, mais peuvent y exceller, et plus particulièrement le mourvèdre qui ne présente pas la dureté tannique qu'on lui connaît habituellement. Depuis l'année dernière, les blancs, jusque-là classés en Vins de pays de la Côte Vermeille, sont intégrés à l'appellation à condition de comporter une forte proportion de grenache blanc et de grenache gris. Ce dernier est également autorisé dans les vins rosés.


Le Collioure met bien en valeur le caractère schisteux du terroir et en transmet la minéralité par un fumé plus ou moins prononcé et une structure sous-jacente, bien lisible dans les blancs. La recherche de la maturité phénolique engendre forcément des vins riches en alcool dont l'équilibre n'est que rarement pris en défaut. De ce fait, les rouges partagent une égale franchise et une absence de lourdeur. Leurs tanins n'encombrent jamais et apparaissent naturellement fins. Les blancs vinifiés sous bois avec discernement gagnent en délié et en netteté. Avec des vins d'une indéniable personnalité, une courte élite démontre que le terroir de Banyuls est aussi doué pour de grandes expressions en vin sec. De nouveaux domaines se sont créés sous cette inspiration.




DOMAINE DU MAS BLANC


Le pays de Banyuls doit beaucoup à André Parcé qui, en son temps, a été un grand promoteur et comme l'ambassadeur du vignoble. Lui ayant succédé, son fils Jean-Michel perpétue une manière de faire aussi originale que singulière. En effet, excepté une cuvée récente de grenache noir, ses Collioure ne misent pas sur ce cépage et valorisent tantôt la syrah (Junquets) tantôt le mourvèdre (Clos du Moulin) ou leur assemblage (Cospronts Levants). De ce fait, leur profil est atypique dans le contexte, d'autant qu'il est le reflet d'un parcellaire bien déterminé. Cette marginalité ne s'arrête pas là et se perçoit encore dans un caractère véritablement tempéré dû à un "défaut" de maturité phénolique. Cette attitude assumée par le vigneron étonne par rapport aux principes œnologiques aujourd'hui largement admis. il en résulte des vins moins alcoolisés et apparemment plus longs à se faire. Ainsi, le vin le plus éloquent de la gamme par sa densité de texture, Junquets 2001, présente encore un trait d'austérité et une allure ramassée qui invitent à le reconsidérer sur le temps. Pour preuve, le 1996 est encore en gestation!



CLOS DES PAULILLES


Ce domaine, le plus vaste sur Collioure et Banyuls (90 ha) et constitué d'un seul tenant, a été acquis en 1975 par la famille Dauré. Son emplacement en bordure maritime en fait un vignoble idéal pour les vins mutés, mais également pour les secs issus de mourvèdre, ce qui est le cas ici. Le Collioure rouge est en effet campé sur ce cépage (près de 75 %) et complété de syrah. Le millésime 2001 a donné un vin généreux mais sans déviance, aux arômes typés (pruneau à l'eau-de-vie) et riche de matière. Sa texture est soyeuse et situe une belle constitution, tout comme une arrière-bouche minérale, sur une saveur chocolatée. Convaincant jeune, le vin évolue avec intérêt, comme en témoigne un 1999 assez similaire mais sentant la garrigue, alors que c'est un parfum de pinède qui marque un 1995 frais, franchement charnu et d'un goût prégnant.


DOMAINE DE LA RECTORIE


Les trois frères, Marc, Pierre et Thierry Parcé, mènent aujour­d'hui un domaine qui, jusqu'en 1984, fournissait la coopération. Les 24 ha rassemblent une trentaine de parcelles où poussent d'une intense sève fruitée, se poursuit par un 2001 plus flatteur et construit en densité, et convainc par un 1991 frais, épanoui sur un élégant fondu et un ton poivré fleurant le terroir. Avec du carignan à la place de la syrah, Le Séris apparaît à peine moins peaufiné et respire un air plus méridional. Ce trait caractérise surtout un 2001 très harmonieux et plus expansif qu'un 2000 ample et structuré. Élaboré en rut, l'Argile est un blanc qui, par cette technique, gagne un toucher délicat et une séduisante, expressivité (en 2002).


LES PROMESSES DE COUME DEL MAS ET DE MADELOC


Avec respectivement un premier millésime en 2001 et en 2002, ces deux domaines font souffler un air nouveau sur l'appellation et affichent une belle ambition, au sens noble du terme. De grands Collioure en perspective. Avant de se consacrer entièrement au domaine Coume Del Mas qu'il a créé, Philippe Gard était conseiller en agronomie dans le Liboumais. Fort de cette expérience, il s'est investi dans la région en considérant intelligemment le savoir-faire local pour lui ajouter la touche de rigueur, voi re de perfection, afin de rehausser l'expressivité et la distinction du collioure.



Ses produits ont déjà rejoint le giron des tout meilleurs. Sa manière d'aborder les rouges montre un engouement pour la veine initiale du fruit. Cela donne la cuvée Schistes, élaborée et élevée avec mesure pour préserver le naturel de vieux grenaches récoltés côté littoral. Dans l'autre option, il fait jouer la synergie du trio grenache-carignanmourvèdre et les actions d'un élevage sous bois, aboutissant à un Quadratur dont le 2001 surprend par sa pureté et une opulence bourrée de vitalité. C'est tout juste si l'équilibre s'avère un peu chaud. Le blanc, Folio, est issu d'un grenache gris (80 %) d'où s'extrait un fruité chatoyant et une matière joliment étoffée par le boisé. Associé à Jean Baills, un vigneron du cru, Pierre Gaillard est venu du Rhône nord apporter au domaine Madeloc des principes culturaux et... le talent qui le distingue si bien dans sa région. 2002 est le millésime probatoire de cette nouvelle propriété qui ne s'en sort pas si mal, surtout par un rouge au fruit sain et au grain de matière appréciable. Les bases d'un rouge 2003 (en élevage et non assemblé) sont de bel augure.


Une majorité de vieilles vignes, essentiellement de grenache noir. Les trois quarts de la production servent les Collioure. Les Parcé montrent une haute estime pour les tâches de la vigne et, sans penchant nostalgique ou volonté d'épate, labourent les sols au mulet. Cette philosophie trouve une correspondance dans des rouges pétris de droiture. Le plus bel emblème est la Coume Pascole, un rouge mêlant une bonne part de grenache à la syrah, toujours d'une étonnante tenue, quel que soit son âge. La cuvée s'annonce par un 2002



Cellier DES TEMPLIERS


Cette coopérative est le principal opérateur de l'appellation, dont elle assure les deux tiers des volumes avec une production méritante. Segmentés suivant les différents marchés, les vins sont mis en bouteilles précocement et, dans l'ensemble, jouent la séduction de la souplesse et du fruit. La large gamme de rouges comprend des génériques bien faits en regard des quantités produites. On en retiendra L'Espérade 2001, une cuvée aux senteurs de garrigue, avec du relief et un tempérament fruité. Sinon, l'intérêt peut se porter sur Mas Cornet 2002, vin solaire et très minéral, ou encore sur Château des Abelles, de bonne constitution et étonnamment iodé en 2002. Le 2000 possède une remarquable "tessiture", au service d'une perception agréable et pénétrante. Aucunement confidentiel, le Domaine du Roumani 2000 donne un peu dans les mêmes qualités. Les réalisations faisant appel au bois apparaissent caricaturales, sauf, peut-être, Cyrcée 2002 où la matière possède assez de répondant pour faire un haut de gamme affiché comme tel.




Source :

Atlas des vins de France Hachette

Grand Atlas des vignobles de France Solar

LA REVUE DU VIN DE FRANCE. MAI 2004

http://www.banyuls.com/banyuls/

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