samedi 1 décembre 2012

Que la fête était belle...


C'est sympa de voir se croiser le petit peuple des amateurs de vin. Cavistes, restaurateurs, vignerons, bien sûr... Mais aussi anonymes, passants par le tintement de verre alléchés ou bloggers bien renseignés. Dans un joyeux brouhaha, tout le monde se presse ce lundi entre les tables du Paul Bert (Paris, 11ème).

A dix heures le bistrot et l'Ecailler voisin affichent déjà complet. Au coin d'une table, intarissable, Elian Da Ros (à gauche) n'en finit pas de raconter son petit dernier, rescapé d'une grêle impitoyable. L'Abouriou 2007 est un joli vin de soif, léger comme une plume, fruité comme un beaujolais. Et pourtant vinifié en foudre, comme ses autres cuvées.
"Malheureusement, à peine 20% des raisins viennent de mes vignes, explique-t-il, franc-jeu. Ce sont des parcelles qui payé cher le passage des grêlons. Le reste ce sont des raisins bio, achetés aux voisins et que nous avons vinifié en macération carbonique. A la Beaujolaise...".
Il raconte, "c'est drôle", que c'est le nom que l'on donne à ce cépage oublié dans le Marmandais: le "beaujolais".

Il est à peine 11 heures et son Abouriou sonne la cloche de l'apéro. Ça tombe bien, Bertrand et Hélène Gautherot (à droite) viennent d'ouvrir coup sur coup un Blanc d'Argile (Chardonnay) et une Saignée de Sorbée. Le champenois respire enfin après quelques semaines de stress intense.
"Il faisait trop froid dans la cave, raconte sa femme. Alors les jus patinaient (voir "Champagne blues", ndla); on a déménagé les barriques dans le réfectoire où il fait meilleur. Et c'est reparti... Les deux tiers des fermentations sont terminées. On est sorti d'affaire..."
A la porte, comme pour fêter la nouvelle Charlotte Senat et Cécile Valette s'offrent une pause cigarette au Champagne. On se pousse, on se bouscule désormais et les crachoirs continuent à se remplir. Ici, interdiction d'avaler... Curieux, Antoine Arena a quitté sa table et ses Patromonio pour faire, un verre à la main, la tournée des (po) potes. "Goûte ce petit-là", dit-il à un restaurateur en désignant la table des Palacios, avant d'aller taquiner Catherine Bernard, soudain hilare (à droite).
"Il faut être dans les vignes lorsque c'est nécessaire, rigole le corse, un verre de Claret à la main. Mais la vie, ce sont aussi les voyages, les dégustations entre amis. Des autres, on apprend tout le temps. Même à 53 ans!"
Apprendre, c'est toute l'histoire de Gilles Azam (à gauche), descendu de sa Haute Vallée de Limoux pour se "méler, se mélanger", comme il dit. A force de Chardonnay et de Chenin, son Crémant joue le jeu des grands Champagnes. Mais la solitude lui pesait.
"La haut, au milieu de mes vignes, je suis bien. Mais parfois, vraiment très seul... Seul en bio au milieu de la viticulture traditionnelle. Je n'ai pas de recul par rapport à mon travail. Moi, j'ai besoin de sentir que d'autres cherchent sur le même chemin."
Là bas, au fond, Paul Reder semble n'avoir besoin de personne. Il remplit les verres avec un mélange de flegme et de timidité. Il sert son grigri, un aramon miraculeusement fruité, qui sent bon la garrigue où poussent ses vignes. Paul vient des Hautes Terres de Camberousse, dans cette région de Sète où son père a défriché pratiquement à la main des terres laissées par le grand-père pied-noir. Il raconte son histoire du bout des lèvres et s'excuse de n'offrir que des blancs sur cette terre rouge.

On le remercie, au contraire, de les faire si beaux.

Et l'on file dans le Jura voisin où les premiers signes de fatigue semblent se faire sentir... Cela fait déjà quatre heures que Pascal Clairet (à gauche) lève le coude... Pour remplir les verres qui se tendent. Le Domaine des Tournelles déroule ses Fleurs de Savagnin et ses Chardonnay oxydatifs avant d'accompagner l'inévitable vin jaune d'un morceau de Comté. C'est délicieusement dépaysant après cette balade plein sud.

Ce n'est plus une dégustation, décidément, c'est le Tour de France!

Mais pardon. J'oubliais le digne représentant la Rioja dans cet aréopage de vignerons hexagonaux. Olivier Rivière est installé de l'autre coté des Pyrénées depuis 2006. A la dure.
"Je suis en fermage sur une partie des terres, j'achète du raisin, je vinifie dans une cave en location. Bref, rien n'est à moi là-bas, sourit l'aventurier. A part le vin, peut-être..."
On goûte et on confirme. L'homme a une patte... Et du bagou.

Il est dix-sept heures. Le Paul Bert est désormais plein comme un oeuf. C'est le temps des apartés. Au bar, Rivière (ci-dessus à gauche) et Valette devisent gaiement un verre (vide) et un café à portée de main. Les frères Puzelas échangent blagues et recettes avec Jean Foillard. La Loire a rejoint le Rhone, le Languedoc côtoie Bordeaux et l'Alsace la Malepère, en passant par la Rioja... et les huiles de l'Olivie.

J'en oublie.

Les sourires de Catherine Breton, la bonne humeur des Plageoles et "les Côtes du Rhone du petit là, Dumarcher... Matthieu..." me souffle encore Arena. J'en oublie encore et des meilleurs. Qu'ils me pardonnent...

En sortant, je croise Charlotte Senat. La maîtresse de cérémonie a le sourire. C'est bon signe. Ce soir un repas rassemblera tout ce beau monde et une cinquantaine d'invités. "En toute amitié", précise le bristol. Une belle fête, vraiment.

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